[Live] Savarin et Camera au Sonic de Lyon

Début d’année sur les chapeaux de roues au Sonic qui accueillait, le 17 janvier dernier, le phénomène allemand de « guerilla krautrock » Camera, réputé pour ses concerts imprévisibles et exigeants. La première partie était assurée par Savarin, entité space rock locale réunissant Chris d’Abschaum et Samy de Pratos.

Camera – crédit : Mehdi Benkler

La soirée débute à guichet fermé et les trois membres de Savarin prennent place devant un public en partie composé d’initiés : en effet, le projet est une réunion entre deux musiciens bien identifiés de la scène psyché et expérimentale lyonnaise, Chris Poincelot (Abschaum, Ashinoa) à la guitare et Samy Assaad (Pratos) aux claviers et aux machines diverses, tous deux accompagnés d’un batteur. Le groupe est tout frais, son concert prend au début des allures de répétition, de jam pas encore parfaitement réglée, qui envoie un ou deux pains par-ci par-là avant de gagner (rapidement) en ampleur et en précision. Son space rock fortement connoté kraut prend la tangente et le ton se durcit au gré de quelques accélérations soutenues du plus bel effet. Les derniers morceaux joués sont particulièrement excellents, même si l’on retrouve en chemin une petite transe piquée au « Hallogallo » de Neu!, jamais bien loin avec Chris.

Lorsque Camera prend place sur scène, la péniche est bondée comme rarement et le trio teuton ouvre les hostilités d’un concert qui durera une bonne heure par un premier crescendo motorik ébouriffant d’une dizaine de minutes. Pas de doute : ils sont bien allemands, ceux-là, avec leur rythmique de métronome et les riffs répétés inlassablement avec des micro-variations. Le public dodeline avec ferveur à mesure que l’intensité grimpe et, après une première explosion, le groupe enchaîne sans pause pour un deuxième mouvement, construit de la même manière mais sur des riffs et un tempo légèrement différents. La troisième partie de cette improvisation est plus retenue ; elle délaisse la furie proto-punk du krautrock à la Cluster et Neu! pour s’aventurer sur les nappes planantes et synthétiques des premiers Tangerine Dream ou des morceaux les plus floydiens d’Ash Ra Tempel (dont on trouve de jolies scories sur les disques de Camera, comme le titre « Lynch » sur « Radiate »).

Le problème, c’est que la rupture de style et de ton est trop brutale et le lieu bien trop bondé. Au bout de quelques minutes sans motorik soutenue, une partie du public de dissipe et ne montre que peu d’intérêt devant cette kosmische Musik. Le brouhaha augmente considérablement, et le volume sonore ayant baissé côté scène, ça s’entend. Il n’en fallait pas plus au groupe pour réagir et conclure sur une nouvelle salve de vingt minutes de krautrock survolté et furieux, suite d’explosions rythmiques et de crashes de guitares qui constitue le point d’orgue du spectacle et nous laisse sur le carreau, hagards. Une bonne soirée comme on les aime, malgré le passage planant qui en aura découragé plus d’un qui aurait eu le malheur d’être un peu trop loin de la scène, enfumée d’encens âcre, comme pour conjurer les esprits et purifier la salle.


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Maxime Antoine

cinéphile lyonnais passionné de musique