[Interview] Roni Alter

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Installée depuis quelques années à Paris après une première vie à Tel-Aviv, la chanteuse folk pop Roni Alter dévoilait, en début de mois son nouvel EP à la douceur romantique et à la chaleur matinale. La chanteuse israélienne nous raconte son brillant parcours (deux albums déjà à son actif), sa vie à Paris, ses rencontres marquantes – dont celle avec Keren Ann – et la naissance de ce nouvel enregistrement.

crédit : Rani Lurie
crédit : Amit Israeli
  • Tu as grandi dans un environnement artistique : un père compositeur et cinéaste, une mère musicienne. Ce cocon créatif a-t-il contribué à te réaliser pleinement afin de devenir l’artiste que tu es aujourd’hui ?

Je suis convaincue que grandir dans une maison riche d’art et de culture a contribué à façonner la personne que je suis devenue, à me construire en tant qu’artiste. Écouter de la musique et chanter avec mon père depuis mon plus jeune âge, bien avant de savoir parler, a fait de moi, sans aucun doute, une personne très sensible à la musique.

  • Ta vie est bercée de grandes rencontres : deux duos avec le regretté Arik Einstein, chanteur légendaire israélien, avec le trompettiste jazz Avishai Cohen, et une amitié avec Keren Ann lors de ton installation à Paris. Peux-tu me parler d’eux ?

Quand j’avais 20 ans, mon père a envoyé à Arik Einstein une démo d’un duo qu’il avait écrit et que nous avions enregistré à la maison, et lui a proposé de l’utiliser sur son prochain album. Arik a rappelé mon père et lui a dit « Je veux cette chanson, et je veux la chanteuse aussi ! ». C’était trop beau pour être vrai. Arik était une personne extraordinaire, et un incroyable chanteur. Un an plus tard, il m’a appelée de nouveau et m’a proposé d’interpréter un nouveau duo avec lui – bien entendu, j’ai accepté (sourire).
Concernant Avishai Cohen, nous sommes allés au lycée ensemble ; c’était une école d’art et nous étions tous les deux en classe de jazz. Nous sommes de très bons amis depuis cette époque. Avishai est, bien sûr, l’un des meilleurs musiciens que je connaisse, et partager la scène avec lui est une sublime expérience. Donc, j’essaie de créer le plus d’occasions possibles afin de partager la scène avec lui ! Je l’ai invité à jouer sur mes précédents album et EP, et il a cette capacité à toujours apporter sa touche très personnelle sur chaque chanson.
Enfin, Keren Ann ! Elle a rencontré mon petit ami, qui l’a photographiée pour ses deux dernières pochettes d’album (« 101 » & « You Gonna Get Love »). J’étais une grande fan depuis mon adolescence, donc la rencontrer était très particulier pour moi. Depuis notre premier rendez-vous, je suis tombée sous le charme de sa personnalité ; elle est tellement cool et talentueuse. Je la consulte beaucoup, et je suis très heureuse qu’elle fasse désormais partie de ma vie musicale. Chanter sur scène à ses côtés, l’année dernière, était un moment que je n’oublierai jamais…

  • Tu viens de sortir, le 8 avril dernier, un EP destiné à la France. Tu n’en est pourtant pas à tes débuts, avec deux albums à ton actif : un premier, « Air Pocket », sorti en 2010 et intégralement chanté en hébreu, et « Go Wild », composé à Paris en 2014 et chanté en anglais. Ce nouvel EP est-il le fruit de ces précédents albums, ou part-il sur une tout autre histoire ?

Ce nouvel EP est un mix entre mon précédent album sorti en Israël (l’an passé) et une nouvelle reprise que nous avons faite spécialement pour ce disque, sur la chanson « I Follow Rivers » de Lykke Li. J’ai écrit toutes les chansons de cet EP au cours de mon premier mois d’installation à Paris. Déménager dans un pays différent, ressentir le manque de la maison, et essayer de construire une nouvelle vie en France… C’était comme une thérapie, pour moi, d’écrire ce que j’avais sur le cœur. J’espère que cet EP est le début d’une belle amitié entre la France et moi (sourire).

  • J’ai pu écouter ton premier album, « Air Pocket », sur Bandcamp. En France, l’Anglais est aussi courant que le Français dans les chansons qui passent à la radio. En Israël, quelle est la place de l’hébreu dans les diffusions sur les ondes ?

Sur les ondes israéliennes, nous avons beaucoup de musique en hébreu, dans différents genres. Je dirais qu’on est sur 60% de musique en hébreu et 40% dans des langues étrangères.

  • Entre tes deux premiers albums, le passage de l’hébreu – dialecte méditerranéen – à l’anglais, aux origines à la fois germaniques et latines, a-t-il influencé, sinon changé ta manière d’écrire tes chansons ?

Totalement. Depuis très jeune, je parle anglais plutôt bien, la transition vers cette langue était donc naturelle ; ceci étant, sachant que cela n’est pas ma langue natale, les mots ne viennent pas forcément aussi facilement qu’en hébreu. Je recherche donc souvent des mots dans le dictionnaire pour trouver celui qui sera le plus juste. Ce processus est différent de l’écriture en hébreu, mais c’est vraiment passionnant.

  • La langue française t’attire-t-elle ? As-tu déjà pensé à écrire quelques chansons en français ?

Depuis mon enfance, la musique française a toujours résonné à la maison : Jacques Brel, Brassens, Barbara… Donc, même si je ne comprenais pas les mots, le langage a toujours été là. En fait, il y a quelques semaines, j’ai écrit une nouvelle chanson en anglais et, tout à coup, certains mots me sont venus en français ! C’était nouveau pour moi, et ça me semble être une manière intéressante de commencer à travailler avec la langue française sur mes chansons. Un mix d’anglais et de français, en fait.

  • Ton projet mélange des racines pop-folk à un bouillon blues et jazz. Comment définirais-tu ta musique, ton univers autrement que par des genres et de manière plus personnelle ?

En général, je peux dire que ma musique vient droit du cœur, sans trop chercher à l’intellectualiser… Pour le meilleur ou pour le pire ! J’écris et j’interprète de la manière la plus honnête qui soit, et j’essaie de mettre sur le devant de la scène le vrai moi, sans fard.

  • Ta musique est nourrie d’un certain romantisme, sinon d’une savoureuse mélancolie qui donnent toute leur poésie et leurs respirations à tes mots. Cette quiétude, cette précaution dans le choix des mots, dans la manière d’inviter en douceur l’auditeur sont-ils le reflet d’une philosophie de vie : prendre le temps de savourer l’instant présent ?

Oui, tu m’as bien comprise ! Je suis une personne qui vit l’instant présent. J’ai du mal à me projeter dans l’avenir. J’aspire à vivre ma vie au jour le jour, et à écrire sur des sujets qui me préoccupent, dans ma tête et dans mon cœur, sur le moment.

crédit : Rani Lurie
crédit : Amit Israeli
  • En tant que Parisienne d’adoption, est-ce que la vie à Tel-Aviv te manque ? Trouves-tu des similitudes entre ces deux grandes villes ?

Paris est une ville merveilleuse, mais Tel-Aviv me manque, oui… J’y vais souvent, donc ça va (rire) ! Je dois avouer que je n’ai pas trouvé tant de points communs que ça entre Paris et Tel-Aviv, jusqu’ici. Ah si, peut-être la même passion pour la nourriture et la gastronomie (rire).

  • Tu en as parlé un peu avant, ton EP se termine par une reprise, « I Follow Rivers » de Lykke Li, popularisée d’abord par les Belges de Triggerfinger. Pourquoi ce titre plus qu’un autre ? Y’a-t-il d’autres artistes que tu aimes ou aimerais reprendre ?

J’aspire à reprendre de titres dont je ressens l’essence proche de mon univers musical. J’adore faire des reprises : prendre une chanson et l’embarquer dans une autre direction. Concernant « I Follow Rivers », je l’ai jouée à la maison il y a plusieurs mois de ça, pensant qu’il s’agissait d’une nouvelle chanson que je composais ; après une heure à jouer ce morceau, j’ai réalisé que cette chanson existait déjà en fait, et que je n’en n’étais pas l’auteure ! J’ai également récemment fait une reprise d’un morceau de Randy Newman, que j’ai interprété en duo avec mon père ; vous en entendrez parler très vite !


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ENGLISH

crédit : Amit Israeli
crédit : Amit Israeli
  • You’ve been raised in an artistic environment : your father is a composer and your mother an actress. Is this creative cocoon helped you to become the artist you are today ?

I’m sure being raised in a house full of culture and art help shaped who I’ll become as an artist. Listening to music and singing with my father from a very small age, even before beginning to talk, made me for sure a very musical person.

  • Your path is full of big meetings : two duets with Arik Einstein, a huge Israeli artist, a collaboration with the trumpeter Avisai Cohen, and a friendship with Keren Ann. Can you talk about them and these meetings ?

When I was 20 years old my father sends to Arik a demo of a duet he wrote, that we recorded at home, and offered him to use it in his upcoming album. Arik called my father back and said « I want the song, and I want the singer too »! It was too good to be true. Arik was an extraordinary person, and an amazing singer. One year later he called me again, and asked if I would like to sing another duet with him – of course I said yes.
Avishai Cohen and I, went to the same high school, it was an art school, and we were both in the Jazz class. we are very good friends ever since. Avishai, for sure, is one of the best musicians I know and being on stage with him is a sublime experience. So I make sure to do it a lot (laugh). I invited him to play on my last album and EP and he always brings his amazing touch to the songs.
Keren Ann I’ve met through my boyfriend, who shoot her last two album covers (« 101 » and « You Gonna Get Love »). I was a big fan of her since I was a teenager, so meeting her was a very special thing for me. Since we met, I fell in love with her personality, she’s so cool and talented. I consult with her a lot, and I’m so happy she’s now a part of my musical life. Singing with her on stage last year was a moment I’ll never forget…

  • You’ve just released an EP for the French audience. It’s not the beginning of your career, you have already two albums: the first one « Air Pocket » out in 2010 is all in Hebrew. The second one « Go Wild » composed in Paris in 2014 is in English. This new EP is the follow EP of these two albums or is it a brand new story ?

This new EP is a mix of my last album released in Israel last year with an addition of a new cover we did especially for it, with the song « I Follow Rivers » by Lykke Li. I wrote all the songs in this EP in the first months when I moved to Paris. Moving to a different country, missing home, and trying to build my new life in France. It was a great therapy for me, to write what’s on my heart. I hope this EP is a beginning of a beautiful friendship between me and France.

  • I’ve listened to « Air Pocket » on Bandcamp. In France, English is a common language in music, mostly as much as French. In Israel what space does Hebrew occupy on radio airplay ?

We have lots of music in Hebrew on the Israeli radio, many kinds. I would say you get 60% of music in Hebrew, and the rest in other languages.

  • Starting in Hebrew, a Mediterranean language, to English – a more Germanic and Latin language ; have had an influence or changing the way your write lyrics ?

Definitely. From an early age I speak English quite well, the transition to writing in English was natural, and yet, this is not my native language, then the words don’t come as easily as in Hebrew, and I often search for words in the dictionary to find the exact word I was looking for. This process is different than writing in Hebrew, but is very interesting.

  • Are you attracted by French language ? Do you think about writing lyrics in French ?

Since I was young, there was always French music playing at my house; Jacques Brel, Brassens, Barbara, so even if I did not understand a word, the language was always there. Actually, just a few weeks ago I wrote a new song in English, and all of a sudden some of the words came out in French ! It was all new for me, and this is an interesting way to start working with the French language in my songs. Mix and match English and French.

  • Your project mixes pop-folk roots with some blues and jazz influences. How could you define your music and universe despite types, in a more personal way ?

In general, I can say that my music comes straight from the heart, without thinking too much. For better or worse. I write and perform in the most honest way possible and try to put the real me in front, without masks.

  • I find some romanticism in your music, at least melancholy that gives poesy and breath to your words. This precise choice of words, in how you invite people carefully, is it the reflect of a philosophy of life: take time to enjoy the present ?

Yes ! You got me ! I’m a present kind of person! I have problems thinking about the future… I tend to live my life day by day, and to write about the things going on in my head and heart at the moment.

  • As a Parisian by adoption, do you miss Tel Aviv ? Do you find some common points between these two big cities ?

Paris is great, but I miss Tel Aviv very much. I go there quite often, so it’s ok.
Actually, I didn’t find many things in common between Paris and Tel Aviv yet, maybe the passion for food (laugh).

  • Your EP ends by a cover of « I Follow Rivers » of Lykke Li, popularized by the Belgians from Triggerfinger. Why this song more than another ? Are there other artists that you like or would like to do a cover of ?

I tend to make covers for songs that I feel their essence is close to my musical world. I love making cover versions, taking to song to different musical directions.
I played this beautiful song at home a few months ago, thinking it’s a new song that I’m writing, and only after an hour I realized there is such a song already, and Lykke Li wrote it. Not me !
I just did a new cover for a Randy Newman song, and made it a duet, with my father. You’ll get to hear it soon…


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques