Il suffit de deux titres dont les effluves électroniques sont aussi doux que savoureux pour se sentir immédiatement conquis par Mokado ; car, avec ce premier EP allant droit à l’essentiel, le compositeur ouvre une nouvelle porte à la musique synthétique actuelle, chargée d’émotions et d’une admirable simplicité.
On échange, on discute avec des artistes. On apprend à se connaître, à partager soit des écrits, soit des compositions. On imagine un profil à travers les mots fleurissant sur nos écrans, sachant que l’on peut avoir autant raison que tort. Mais, plus que tout, on perpétue un respect qui nous incite à vouloir apprendre toujours plus, à nous immerger dans l’autre et dans son art. Lorsque l’auditeur rencontre « Hatsu / Hemal », les deux personnages imaginaires de Mokado, il perd pied ; il s’égare dans son propre subconscient, le souffle coupé par la mélancolie sensitive qui émane d’accords et d’arrangements simples et immédiats, par la constance d’une ambiance en apesanteur. Deux pistes différentes dans leurs évocations respectives, mais pourtant tellement complémentaires ; le jour, radieux, et la nuit, mère de tous les plaisirs et de toutes les rencontres.
« Hatsu » nous plonge dans la torpeur, dans la luminosité croissante de sonorités à la fois cristallines et profondes. Sur un rythme précis, marche en suspension dans l’air et le vide, les instruments se complètent, se répondent, certains nous évoquant un chant, un cri qui nous attire inexorablement vers l’inconscience. L’onirisme qui irradie du titre nous aveugle, efface tous nos repères et s’insinue dans nos veines, médecine douce chassant les idées noires et le désespoir. Nous ressentons alors comme une envie de nous échapper, d’affronter la nuit et de nous y noyer : « Hemal » sera notre guide, danse de la renaissance et de l’extase emplie d’une sensibilité à fleur de peau, qui rampe dans nos esprits et stimule nos corps et nos épidermes. Invitation merveilleuse au dépassement de soi, elle résonne longtemps, souriante et confiante en nos forces mentales. Mokado se mue en guide spirituel, nous apprenant à laisser de côté nos angoisses et à savourer un bonheur auquel on omet d’accorder son importance capitale.
« Hatsu / Hemal » est d’une exceptionnelle qualité sensorielle et harmonique, prouvant que les machines peuvent avoir une âme si l’on sait leur parler. Tout est affaire de communication, encore une fois ; et Mokado facilite grandement notre ouverture à ses compositions en nous donnant, généreusement, ce que ses deux muses lui ont murmuré et qu’il a sculpté, avec une dévotion et une intégrité mémorables. Tant et si bien que l’on retourne dans ces méandres harmoniques, sans être capable de résister à leur appel.
« Hatsu / Hemal » de Mokado est disponible depuis le 19 janvier 2018 chez Le Hameau Records.
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