[EP] MATA HARI – Building Site

Frères d’armes des intrépides Fabulous Sheep, avec qui ils partagent une proximité humaine et musicale symbolisée par un amour viscéral commun pour l’objet rock indépendant, les membres de MATA HARI optent néanmoins pour une version plus immédiate, plus brute, en somme moins mélodique, mais pas moins passionnée que celle leurs potes biterrois.

Le punk anglais est à l’évidence une source d’inspiration principale à la fois d’un point de vue sonore mais aussi au niveau de l’attitude. Par rapport à leur premier EP, les compositions et même la nouvelle version de « John Difool » contenues dans « Building Site » ne s’embarrassent plus d’aucun artifice et de superflu, et vont droit au but. On en prend plein la gueule pour notre plus grand bonheur, à commencer par ces coups de lattes assénés par le tandem basse batterie, implacable et imposant (« Factory »), ces lacérations d’accords de guitare, énergiques et inarrêtables (« John Difool »), ces torsions cervicales subies à travers les nappes de clavier, vicieuses et agressives (« Castle »).

Le tout est sale, nerveux, très loin de Pro Tools. Cet EP vivifiant et tonique, déborde ainsi de générosité, de baves, de sueurs, d’imperfections, d’excès, de frustrations (au sens propre comme au figuré sur « Castle » !), et bien évidemment de rage. Il y a certainement plusieurs façons de considérer le rock, la plus commune favorise la célébration des icônes christiques, objets de toutes les convoitises, dans une verticalité créative qui tient parfois beaucoup plus de la tyrannie, de l’individualisme et de l’égocentrisme.

À l’inverse, chez MATA HARI, le punk semble être un cri du cœur collectif, un refus de la norme, un doigt d’honneur à la bien-pensance, dans la droite lignée des Clash, des Slits, des Dead Kennedys, de Joy Division et plus proche de nous, des Parisiens. Ensembles, unis comme les doigts de la main, pour le meilleur et le pire (et donc ici le meilleur), ces trois galopins turbulents (rejoints par deux énergumènes de la même espèce sur ces enregistrements !) nous rappellent à juste titre que leur musique est avant tout être une histoire d’envie, de désir, de sincérité, de passion à défaut d’être une affaire prétentieuse menée par d’imbuvables poseurs arrogants, dont le but ultime serait – comble de la schizophrénie artistique – de faire la couverture des magazines de mode !

crédit : Yann Landry

« Building Site » de MATA HARI est disponible depuis le 13 décembre 2019.


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Laurent Thore

Laurent Thore

La musique comme le moteur de son imaginaire, qu'elle soit maladroite ou parfaite mais surtout libre et indépendante.