[Live] Deap Vally au Point Éphémère

En sortant « Femejism » à la rentrée, Deap Vally est parti en guerre contre la misogynie avec la fureur rock qu’on lui connaît. De retour à Paris, le 4 octobre 2016 au Point Éphémère, après de longues années d’absence, le duo californien est venu passer le message au cours d’un concert jouissif à l’énergie folle.

Deap Vally © Cedric Oberlin
crédit : Cedric Oberlin

Deap Vally représente la fureur rock dans sa formule la plus simple : une guitare (ou une basse) et une batterie. Et c’est peut-être ce qui fonctionne le mieux dans le genre aujourd’hui tous sexes confondus : Drenge, Slaves, Royal Blood et The Garden pour les hommes, Best Coast, Bleached et Honeyblood pour les femmes.

Le projet est ainsi mené par Julie Edwards (batterie, chant) et Lindsay Troy (guitare, chant), deux Californiennes aux cheveux coulant sur les épaules et aux fringues kitsch moulantes, et dont l’énergie inépuisable est mise au service de leur style bluesy décapant. Elles ont sorti deux albums dans la même lignée, mais un second « Femejism » encore plus abouti grâce à un précieux coup de main à la production de Nick Zinner des Yeah Yeah Yeahs. Ce dernier a donné de nouvelles nuances au son des Angelenas, dont certains titres peuvent désormais frôler la pop quand d’autres résonnent comme des quasi-balades.

Pas de temps pour un échauffement, le set se lance sur les lourdes cordes de « Little Beauty Queen » où la chanteuse Lindsay Troy semble déjà se déchirer la voix. On comprend immédiatement que le duo a décidé de mettre le paquet et de faire la part belle au blues et au garage le plus sec de sa discographie. Les très chargés en riffs « Bad For My Body » et « Gonna Make My Own Money », singles du premier album « Sistrionix » suivent ainsi dans une logique destructrice imparable.

De quoi donner un set des plus cohérents où les temps morts n’ont pas leur place, sans balade en guise d’interlude (dont « Critic » aurait, par exemple, pu jouer le rôle), et au goût âpre de la sueur et de la bière. En somme, du rock pur et dur, où la guitare fait des étincelles et la grosse caisse s’ancre sur nos pulsations. Le tandem tente néanmoins parfois de s’aventurer vers d’autres paysages musicaux, avec quelques titres du nouvel album tel que « Gonnawanna » ou « Smile More » où le parler de Lindsay Troy rappelle la nonchalance d’une Courtney Barnett.

Le rythme et l’intensité se sont maintenus grâce à la générosité des deux musiciennes, que ce soit la batteuse qui donne une image des plus sauvages et suantes de sa discipline, cheveux giclant au rythme des chansons et de ses beats nerveux. Julie Edwards la joue même en solo quand sa comparse s’autorise une séance de crowd-surfing. Pieds nus, la guitariste a mis l’ambiance tout le long du set, se dressant sur les enceintes pour jouer et même sur la grosse caisse de sa partenaire, avec pour but de rallier son public autour de ses hymnes rock tels qu’« End of the World » aux paroles fédératrices : « Come on everybody, listen up ! ». Malheureusement, la fosse semble plus concentrée qu‘excitée, les pogos ne montrant le bout de leur nez qu’aux ultimes hymnes du rappel qui sont extraits de « Sistrionix ». Ce sont, en effet, « Baby I Call Hell » et « Walk of Shame » appelés de vive voix par les fans depuis le début du show, et débarquant finalement quand celui-ci arrive à son terme, qui viennent soulever la fosse comme un seul homme. Les meilleurs titres de « Femejism » semblent à côté encore trop frais dans toutes les têtes pour susciter une telle ambiance. Nous parions pourtant sur un bel avenir au tube à la sauce très Nick Zimmer, « Post Funk », gros temps fort du disque qui a démontré toutes ses qualités sur scène.

Le set s’apparentait ainsi comme le grand moment de fraîcheur salvateur après une dure journée de boulot, où tout le monde en a pris plein les oreilles pour nous prodiguer un bien fou. En somme, un concert addictif qui nous donne envie de réclamer des « Encore » à n’en plus finir. C’est un groupe que l’on voit bien peu souvent chez nous, et c’est bien dommage. « Ça faisait un bail ! » a lancé Lindsey à peine arrivée sur scène. On espère ne pas attendre aussi longtemps d’ici la prochaine fois !


Retrouvez Deap Vally sur :
Site webFacebookTwitter

Photo of author

Charles Binick

Journaliste indépendant, chroniqueur passionné par toutes les scènes indés et féru de concerts parisiens