[Interview] Moodoïd

Chez indiemusic, on avait beaucoup aimé « Le Monde Möö », le premier album de Moodoïd. Quatre ans après, Pablo Padovani revient avec un nouveau disque, « Cité Champagne ». Lors du festival Aucard de Tours, l’artiste multidisciplinaire nous a expliqué les raisons de ce virage électro-pop et de cet univers visuel surréaliste, représentés à travers une mégalopole en effervescence.

crédit : Andrea Montano
  • Salut Pablo ! Tu viens de sortir ton deuxième album, « Cité Champagne ». Quel en est le concept ?

J’avais sorti ce premier album qui s’appelait « Le Monde Möö » et qui était un peu un album-concept qui se passait dans une sorte de conte pour enfants et dans un paysage de collines en crème fouettée. C’était un truc très sucré. Et je suis sorti de cet endroit pour aller dans une grande ville qui s’appelle la « Cité Champagne ». Une sorte de ville fantasmée que j’ai un peu imaginée lors de tous les voyages que j’ai faits dans les trois dernières années. J’ai profité de ce temps pour m’inspirer de grandes mégalopoles, dont l’incroyable ville de Tokyo, qui était l’une de mes références.

  • Le morceau « Planète Tokyo » symbolise bien ce virage électro-pop que tu as pris avec cet album. Ce disque a été construit en collaboration, notamment, avec Pierre Rousseau, du groupe Paradis. Comment l’as-tu rencontré et comment est venue cette collaboration avec lui ?

J’ai rencontré Pierre de par notre amour en commun pour la musique japonaise. Lors de mon voyage en 2014 au Japon, j’ai écrit cette chanson, « Planète Tokyo » ; et, quand j’ai rencontré Pierre, je lui ai fait écouter cette première maquette. Tout de suite, ça lui a inspiré la musique de Yellow Magic Orchestra, qui est un groupe très connu au Japon. Et ça nous a donné envie de faire un album qui s’inspirerait de cette musique-là et de ces références que l’on avait en commun. C’est donc ça qui a créé cette rencontre musicale avec Pierre et qui a donné « Cité Champagne ».

  • Il n’y a pas que lui qui a collaboré dessus. J’ai cru comprendre qu’il y avait aussi ton père, Jean-Marc Padovani, qui est saxophoniste. Et il y a aussi Flavien Berger. Sur quels morceaux est-il intervenu ?

Flavien Berger est un musicien que j’aime beaucoup et qui m’a aidé sur une chanson qui s’appelle « Chamberlain Hotel ». Une fois, juste avant les enregistrements, il me manquait des paroles et des textes. J’étais à un dîner où il était présent, j’avais plein d’e-mails à envoyer juste avant de manger, justement pour finir de préparer mes enregistrements et il est venu me voir. Il m’a dit : « Écoute Pablo, j’ai l’impression que t’as l’air un peu speed là. Si jamais t’as besoin d’aide pour quelque chose, je suis là ». Et je lui ai répondu : « Ouais, en effet, il me manque un texte sur une chanson ». J’ai commencé à lui raconter l’origine de cette chanson, ce que j’imaginais, ce qu’elle m’évoquait, et cette histoire avec ce fameux hôtel, le Chamberlain Hotel, dans lequel je suis allé à Los Angeles. Et il a écrit ces jolies paroles.

  • Tu prêtes aussi une certaine importance à l’univers visuel de ton projet, Moodoïd. C’est toi qui a réalisé la pochette de l’album ? Des personnes t’ont-elles aidé ?

J’ai travaillé avec une très jeune photographe japonaise qui s’appelle Izumi Miyazaki. Je vous invite à aller voir son travail, c’est vraiment formidable. C’est une jeune fille qui a 21 ans, qui vit vraiment à la campagne près de Kyoto. Et, en gros, elle ne fait que des autoportraits. Mais il y a un côté très homemade. Elle fait ça chez elle. Et se met toujours en scène, ce qui donne toujours des photos surréalistes avec des photomontages. On ne sait jamais trop si c’est vrai ou non, si c’est complètement monté ou si c’est une scène qu’elle a vraiment vécue. C’est quelqu’un qui a un univers visuel très fort et qui est très pop. J’ai réussi à entrer contact avec elle, ce qui n’était pas évident. C’est elle qui a fait tous les visuels qui accompagnent le disque, l’objet : le vinyle et le CD.

  • À côté de cette activité de musicien, tu es aussi réalisateur. Tu as fait le clip de Juliette Armanet pour « L’Amour en Solitaire » et celui de Paradis aussi, « Recto Verso ». Il y a également celui de « Miss Smith », qui est assez drôle, surtout au niveau de la façon dont il a été fait. Tu as invité des personnes à un faux casting. Comment ça s’est passé ? C’était quoi, l’idée de ce clip ?

Dans ce clip, je me suis fait aider par Nick Roney, qui est un jeune réalisateur américain. L’idée qu’on a eue, c’est que cette chanson parle d’une rupture avec une ex-petite amie, Miss Smith. Et Nick m’a dit : « Écoute, il faut absolument que je t’aide à retrouver une petite amie ». Il m’a proposé d’organiser un casting pour trouver quelqu’un qui fasse penser à cette Miss Smith que j’ai perdue. On a loué une maison et on a organisé un vrai casting. Plusieurs jeunes femmes sont venues. Sauf qu’en fait, ce casting était le tournage du clip. Et elles l’ont découvert au fur et à mesure : elles sont arrivées dans la maison, on leur a mis des tenues, on leur a demandé de faire des choses comme on ferait lors d’un casting. Et, petit-à-petit, elles ont compris que c’était un tournage de clip, ce qui était assez marrant. Ça donne quelque chose entre le documentaire et la fiction, c’est assez touchant.

  • J’ai cru comprendre que tu étais accompagné différemment avec ce deuxième album sur scène. Qu’est-ce qui change par rapport à avant ?

En effet, parce que j’ai toujours envie que Moodoïd soit un projet où un album soit quelque chose à part entière. Avec ce nouveau live, j’ai décidé de m’entourer de la nouvelle scène jazz française. Ce sont des gens de ma génération qui ne jouent que dans des groupes de jazz et qui ont bien voulu jouer mon espèce de pop un peu bizarre. Et c’est génial, parce que ça donne quelque chose sur scène. On est loin des codes de la musique pop dans le sens où, dedans, il y a assez de groupes qui sont formatés, qui jouent avec des bandes, des ordinateurs… Nous, on ne fait pas du tout ça. Il y a quelque chose de très vivant, où on se laisse beaucoup d’improvisations et de marges de liberté pour pouvoir faire danser les gens, faire groover des moments… Qu’il y ait du hasard, en fait, qui rentre en compte. Je suis un immense fan de Prince. Et les lives de Prince dans les années 80, c’est quelque chose qui m’a énormément touché. J’avais envie de pouvoir vivre ça avec les grands musiciens qui m’accompagnent sur scène.

  • Toi aussi tu accompagnes d’autres groupes sur scènes, notamment Melody’s Echo Chamber. Est-ce que tu vas le suivre prochainement sur des dates ou est-ce que tu vas accompagner d’autres musiciens ?

Pour l’instant, Melody’s Echo Chamber n’a pas de tournée prévue. Maintenant, Mélody vit dans le sud de la France, et je crois qu’elle compte sortir de la musique sans forcément faire de concert pour l’instant, d’après ce que j’ai compris. Donc ce n’est pas trop d’actualité, et c’est vrai que je crois que j’ai envie de passer un peu ma vie à faire des concerts avec Moodoïd et à défendre cet album du mieux possible. J’essaie pour l’instant de me concentrer là-dessus.

Interview réalisée en collaboration avec Radio Campus Tours


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Yann Puron

Découvreur musical avide d'émotions fortes aussi bien sur disques qu'en concerts