[LP] Niandra Lades – Night Funeral

Nommé initialement en référence au premier album de John Frusciante, Niandra Lades, projet alt-folk domicilié dans le département des musiques amplifiées clermontoises, rebranche ses guitares, rallume les amplis à lampes et ranime son chanteur le temps d’un second album fiévreux et mystique.

Cinq ans ont passé depuis leur premier album éponyme, reniflant à pleins poumons, le mouchoir au coin des yeux, la nostalgie du refus de grandir et d’abandonner les idéaux de l’enfance sur des titres authentiquement touchants (« Yo – Yo », « To Emma »), larmoyants (« Oh Sun ! »), parfois traumatiques (« Birds ») ou apaisants (le formidable « Above the Clouds »). Du cache-cœur au tire larme, la mélancolique formation auvergnate sublimait alors, avec une rare force, la tristesse pure dans son exercice le plus sincère et vital. Niandra Lades honorait certainement la mémoire de son modèle d’écriture et de pensée en la personne d’Elliott Smith.

Avec « Night Funeral », c’est un autre exutoire, cathartique et ravageur, que le désormais quintette, toujours emmené par son indispensable chanteur, Alexandre Costa, à la voix âpre et endolorie, s’apprête à partager avec nous. Une épreuve de force et de conviction. De la colère à l’acceptation, pour aller jusqu’à la reconstruction, Niandra Lades fait ici le deuil de ses racines afin d’avancer et de livrer une œuvre salvatrice aux saveurs complexes et douces-amères (le brûlant et écorché « Yuk – Ae » ou le destructeur « In The Blizzard »), mais fatalement attrayantes (la vive passion dévorante de l’éponyme « Night Funeral »).
C’est ce penchant pour la noirceur, contagieuse, que la bande d’amis sublime au fil de ces neuf titres singuliers et poignants, neuf mémorandums à la puissance évocatrice stupéfiante.

Cinq années auront été nécessaires pour accomplir ce long travail sur eux, pour parvenir à cet album au tragique fascinant, furieusement hors pair, déchirant comme les ballades noires de Mark Kozelek ou les errances magnifiques de Nothing (dont l’œuvre shoegaze monumentale, « Tired of Tomorrow », s’en approche sensiblement par bien des manières, tant sur le lyrisme et le caractère que l’exigeante retenue, sinon la distance).

Mystique sur « Crows », réconciliatrice sur « Carvalhal », pacifiée sur « Ready » ou fantomatique sur « Uneasy », la création de Niandra Lades suit son évolution mouvementée au sein de l’exigeant « Night Funeral », coup fatal porté à ses convictions shoegaze désenchantées, prenant la nuit pour refuge de ses pensées abstraites en quête de sens. Dans la fureur et la rage de « Soldiers » et « Mountain M », ultimes bastions d’une résistance noise organisée, débranchée de ses racines folk bénignes, la bande de Clermont-Ferrand frappe les corps et les esprits par son œuvre forte d’engagements et de convictions sincères, de grandeur et d’autorité. Une œuvre alternative adulte, majeure et magistrale.

« Night Funeral » de Niandra Lades, sortie le 5 mai 2017 chez Kütu Records.


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques