[LP] Watine – Atalaye

Il ne manquait plus à Watine, au fil de ses errances musicales en perpétuel mouvement, que la présence de la langue française au centre de mélodies et d’harmonies précises, méticuleuses et profondes. Avec « Atalaye », la grande dame se met à nu et réinvente à la perfection ses dons de créatrice et de compositrice. Avec une émotion totalement inédite et aussi fraîche que la plus tumultueuse des rivières.

Watine - Atalaye

Elle avance lentement, le pas léger, dans les lumières d’une aube synonyme de renaissance. L’air de rien mais en veillant à tout, Watine, merveilleuse artiste, continue son périple musical au fil des vents et des bruissements dans les branches d’une nature qui lui est propre et dont elle est l’immuable reine. Elle conserve son courage et va encore plus loin en nous offrant son nouveau projet, « Atalaye », qui, plus que de simplement prolonger la magie de ses doigts et de ses inspirations, repose à plat chaque apprentissage fait au bord de ces longues mais passionnantes années. Et elle ose, enfin, se sentir portée par la langue de Molière, qu’elle délite pour laisser sa sève la plus douce-amère parcourir nos veines et les imprégner, pas à pas. Chaque histoire qui nous est confiée ici nous plonge dans un univers de contes aussi lumineux que mystérieux, là où des créatures invisibles côtoient des êtres surnaturels et enchanteurs.

L’inconnu devient le terrain de toutes les envies, de folies intimistes au pouvoir émotionnel traversant les âmes et les cœurs. Qu’elle nous prenne par la main pour une valse au milieu des esprits de la nuit (Appalaches) ou lors d’un dialogue entre cordes (Conversation d’Archets), Watine fascine et donne à sa nouvelle aventure des atours de mysticisme et de luxure dans la simplicité. Tout est à fleur de peau, sensible et frissonnant (La raison qui me pousse) ; comme si le diable venait charmer l’homme de ses attraits les plus subtils, entre frisson et exaltation (Ma déchirure). On croise le spectre de Danny Elfman au détour du chemin (Sur la dune), ou encore l’obsédante mélancolie d’une musique de chambre sur le fil du rasoir (Atalaye). Et même quand le folk s’unit à des rythmes entre jazz et pop (À l’ombre des saules, Badaboum et tralalère), Watine peint de mille couleurs pastels et brumeuses, son pinceau frôlant la feuille avec une dextérité mêlée de passion et d’un total don de soi.

Bien sûr, comme chacun, on va surtout retenir le pas qu’elle a décidé de franchir en laissant son timbre distiller sa sublime beauté en français. Et la conclusion est simple : en passant ce cap et la barrière du langage, Watine, déjà confidente, devient confiante et toujours plus téméraire. Peu d’artistes hexagonaux se passionnent autant pour la musique des mots, son union avec les arrangements et les instruments qui la bercent. La voix est une merveilleuse invitation au voyage, à celui dont les dix étapes que l’on parcourt avec elle semblent nous emmener vers un ailleurs, intemporel et étrange. Les paysages défilent devant nos yeux avec la même folie que les heures vécues ; les années perdues pour lesquelles il n’est jamais trop tard si l’on se dit enfin qu’elles sont là, que l’enfance innocente et l’âge adulte raisonnable sont totalement conciliables, tout en apprenant que l’un ne va pas sans l’autre. « Atalaye » marie la raison à la folie, l’illumination harmonique à l’introspection la plus pure. En se dévoilant toujours plus, Watine expose ses visions tant oniriques que magnifiquement humaines. Elle nous caresse et nous invite à la méditation, au contact naturel de l’individu avec le monde qui l’entoure. Ses joies, ses peines, ses surprises. Et ses songes, divins et parfumés de mille senteurs.

Watine

Au fil des ans, il est toujours difficile d’exprimer la passion que l’on a pour Watine. « Atalaye » se vit, s’éprouve et se découvre au fil des écoutes, alliant à la perfection la féerie musicale et la poésie des mots. Autant l’avouer : la grande dame est encore parvenue à nous émouvoir aux larmes.

« Atalaye » de Watine, disponible le 21 juin 2015 chez Catgang Music.


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Raphaël Duprez

En quête constante de découvertes, de surprises et d'artistes passionnés et passionnants.