Pendant dix jours, du jeudi 18 au dimanche 28 mai, le Ferrailleur de Nantes fête ses dix ans. Devenu l’un des lieux emblématiques de l’île de Nantes à travers une programmation rock et metal éclectique et exigeante, le café-concert situé au cœur du Hangar à Bananes accueillait, samedi 20 mai, une série de concerts très électriques avec Corbeaux, Lysistrata, Papier Tigre et Totorro, elle-même précédée en fin d’après-midi et en extérieur de deux sets assurés par les excellents Throw Me Off The Bridge et My Name is Nobody.
Avec pour comité d’accueil, le noise rock furieux et oppressant de Corbeaux, la fête commence sous de graves augures. Tout en nervosité et sans respirations, le quatuor quimpérois avec ses guitares abrasives, sa basse meurtrière et sa batterie lourdement martelée, parfois complétées d’un lead de l’extrême font de ce premier set une expérience peu recommandable aux non-initiés. Une presque messe noire à l’heure où le soleil pointe encore. Un concert violent et animal, assurément le plus sombre des quatre projets programmés à l’intérieur du Ferrailleur avec son mélange destructeur de post-rock, de post-hardcore et de noise saignant les oreilles. Nous ne sommes pas venus pour souffrir, okay ?
Si tu ne viens pas à Saintes, c’est Lysistrata qui vient à toi. Le trio rock vénère et gentiment frappé de Charente-Maritime a cassé la baraque à l’occasion des dix ans du Ferrailleur. À l’unisson et communiquant énormément de plaisir, les trois kids et amis d’enfance, Max, Ben et Théo ont fait preuve une implacable unité de ton et de voix pour animer et malmener leur rock noisy aux lourdes incisions math rock et aux effusions savamment post-rock.
Une prestation inspirée, passionnée, épique et transpirante qui a filé comme une comète. 40 minutes de plaisir survolté qu’on n’a pas vu passer et qu’on aurait aimé voir durer encore un peu. Une sacrée démonstration qui nous prouve que leur tournée récente dans le cadre de leur victoire au Prix Ricard Live cette année les a sacrément rodés pour la suite !
Place ensuite aux parrains du math rock nantais : Papier Tigre. Plutôt discrets ces dernières années, hormis quelques concerts avec la troupe quadriphonique de la Colonie de Vacances (Pneu, Electric Electric, Marvin et Papier Tigre), le trio nantais revenait pour quelques dates dans le Grand Ouest à l’occasion des quinze de Kythibong, son label.
Installés en ligne pour un face à face avec le public, la batterie au centre, les glorieux rockeurs assurent un spectacle d’anniversaire façon retrouvailles, détendu dans les interludes, musclé et ingénieux le reste du temps avec des percussions et des maracas à foison. Une performance techniquement à l’aise, composée des plus belles structures savantes de la bande d’Éric Pasquereau, qui nous prouve à l’instar de Cédric Villani que les constructions mathématiques peuvent se montrer parfois ludiques sinon bien fun.
C’était inévitablement le concert le plus attendu de la soirée : six mois après son dernier passage au Ferrailleur, tout juste rentré d’une tournée délirante en Asie dans le cadre du French Miracle Tour avec Yelle, KillASon et Manceau, et avec un second album « Come To Mexico » désormais bien rodé sur scène, Totorro a livré une prestation fédératrice et délicieusement complice sur cette belle scène qui a été la toute première à croire en son aventure. Le public ne s’est pas trompé non plus en remplissant le lieu pour partager en comité serré ce moment précieux avec ces quatre Rennais fougueux d’amour.
Un rock instrumental et festif, toujours aussi chaleureux et dansant, doté d’une poésie revigorante. Une performance gorgée de puissance et d’énergie, doublée d’un savoir-faire et d’une créative totale. Un récital couronné des acclamations et des mouvements allègres des spectateurs nantais. Au Ferrailleur, l’extase était au programme de cette soirée, nous pouvons en attester ! Et nous ne l’oublierons pas de sitôt : joyeux 10 ans au Ferrailleur !
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