Un disque dont la genèse a été plus que chaotique, mais qui devient rapidement l’un des opus essentiels du rock de 2016. Comme quoi, même après les pires galères possibles et imaginables, on peut ressortir grandi de telles expériences, comme le prouve avec volonté et intelligence Big Deal grâce à sa nouvelle cuvée.
« Say Yes », le troisième LP du duo anglo-américain Big Deal, a bien failli ne jamais voir le jour. En effet, les déboires se sont enchaînés pour nos deux musiciens, et pas qu’un peu : un ordinateur contenant toutes les démos volé en 2014, un label qui, de ce fait, les lâche, et un cambriolage qui aurait pu très mal tourner… Autant dire que le projet a accumulé les galères, mais n’a jamais baissé les bras. Pour preuve, cette collection de onze chansons réécrites en repartant de zéro, et qui, au final, prennent une dimension encore plus poignante ; comme s’il avait fallu passer par toute cette misère pour enfanter l’un des phénomènes rock de l’année, sans conteste possible. Autant dire que toutes ces anecdotes renforcent notre amour pour Alice Costelloe et Lacey Underwood, tout en nous autorisant à pénétrer dans leur travail le plus abouti et soigné à ce jour.
Début des hostilités avec « Hold Your Fire », rock presque grunge dont le classicisme se voit transporté par les chœurs de nos deux compositeurs, apportant une touche encore plus profonde et puissante à une piste qui alterne calme et tempête avec une sérénité troublante. « Avalanche » est un monument d’électricité débridée et lancée à pleine vitesse dans nos synapses, de même que, plus loin, « V.I.T.R.I.O.L » et « Veronica » deviennent les hymnes immédiats d’une génération à la dérive et qui ne trouve son équilibre que dans la saturation des esprits. Calmant le jeu pour mieux relancer les chevaux à pleine vitesse lorsque le besoin se fait sentir, notamment grâce à « Lux » et à l’épique « Idyllwind », Big Deal a pris le temps de coucher ses fantasmes et colères avec constance et intelligence, sans fausse note ni erreur de parcours. À ce titre, « Say Yes » (le morceau éponyme) est aussi furieux qu’émouvant, nous appelant à appuyer sur la touche « repeat » pendant de longues heures.
On aurait pu penser que le groupe n’allait jamais se remettre de sa malchance ; au contraire, il en ressort grandi et toujours plus mature, nous offrant un album qui nous fait frémir de plaisir et remuer nos nuques puis tous nos corps, en rythme, en osmose, en liberté. Une extase totale, inattendue et aussi généreuse qu’essentielle ; « Say Yes » reçoit notre approbation sans aucune hésitation, et va nous suivre très longtemps encore. Force et sensibilité dans un rock tantôt dévastateur, tantôt subtil et superbe ; certainement l’un des plus grands cadeaux de 2016, ou du moins, l’un de ceux qu’on gardera précieusement sous coffre pour éviter de se le faire piquer par des âmes mal intentionnées. On ne sait jamais…
« Say Yes » de Big Deal est disponible depuis le 17 juin 2016 chez FatCat Records.
