[LP] Daniel Woolhouse – What’s That Sound?

Nous l’avons connu amer, les bras dans le plâtre douloureux de l’électronique anglaise, avec pour nom l’un de ces quartiers londoniens connu pour son ambiance et sa bonne humeur. Mais seule la suite de ce nom dérogeait à la règle et résumait l’ambivalence : Deptford Goth, miasme de micro-organismes romantiques et délicieux, à la production clinique et au pouvoir hypnotisant. Aujourd’hui, l’homme revient sous son vrai nom, Daniel Woolhouse, et renverse la donne. Comme quoi, rien n’est jamais acquis. Ironie, gaieté et folie passagère font la part belle à « What’s That Sound? » comme une question qu’il se pose à lui-même.

Daniel Woolhouse - What’s That Sound?

La saga musicale de l’Anglais continue, et quelle saga ! N’importe quel actif mélomane de la scène britannique aura entendu parler du Londonien Daniel Woolhouse, qui commença il y a trois ans avec son somptueux « Life After Defo » ; album d’une envergure musicale trop souvent sous-estimée. Sombre virée dans l’intimité du Monsieur, cet album était l’un des plus prometteurs jamais entendu, au même titre que l’album premier et éponyme de James Blake. Entièrement produit et composé par Woolhouse en personne, « What’s That Sound? » est une collection de lurons sonores, euphoriques à souhait jusqu’à l’ivresse.

Bien que tout semble les opposer, l’humeur de Deptford Goth ne semble pas si éloignée de « What’s That Sound? ». Son précèdent album, « Songs », commençait à dégager ce caractère changeant, néanmoins toujours enrobé de ce rythme lent et léthargique qu’on lui prêtait. Décidément moins lugubre qu’à ses débuts et désormais plus assumé et installé dans la gaieté, Daniel Woolhouse garde tout de même son caractère mélancolique, comme dans « Dreamt I Was A Ceramicist Too » qui résonne comme un slow de fin de party où même la boule à facette semble fatiguée de tourner sur elle-même. Ne parlons même pas de « Map Of The Moon » qui semble être partie en orbite autour de la lune, projetant des vapeurs 60’s de sa traînée cosmique, faite de saxophone, de synthés et de légers chœurs éthérés.

L’humeur joyeuse ne s’échappera jamais dans l’album, elle prendra pour métronome la voix toujours aussi monotone et tranquille de Woolhouse, que rien ne viendrait déranger, mais qui s’attelle tout de même à créer de vrais moments de grâce avec « Crazy Water » et le morceau acoustique « Skeleton » qui arrive en vraie pochette surprise, comme un peu un cheveu sur la soupe. En parlant de soupe, cet album regorge de titres au nom assez drolatique comme « Soup For Brains » et « Tomorrow’s Egg » où leur musicalité s’engorge dans une maestria toujours animée par une joliesse éméchée, en état d’ébriété, consciente de son attractivité lunaire et faisant tout pour défier la gravité. Ivre de sens, Daniel Woolhouse nous mène gentiment sur sa piste de danse. Mais la fête touche à sa fin… Confettis et cotillons à terre, il est le seul irréductible et continue à suivre chancelant son magnifique karaoké. Seul, encore illuminé par les spots multicolores. Toute sa mélancolie vient de là.

Daniel Woolhouse

« What’s That Sound? » de Daniel Woolhouse est disponible depuis le 28 octobre 2016 chez 37 Adventures / [PIAS].


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Julien Catala

chroniqueur mélomane, amoureux des échanges créés autour de la musique indépendante