[Live] Paris Psych Fest 2016, jour 2

Si la journée du samedi 18 juin nous avait particulières déçus, celle du dimanche 19 juin a permis aux artistes présents de faire monter la sauce qui n’avait, jusque-là, que peu pris. Le temps permettait aussi cette accalmie réjouissante ; les torrents ayant gentiment laissé la place à quelques nuages diffus et une lumière d’automne grisonnante.

Jacco Gardner - crédit : Bastien Reveco
Jacco Gardner – crédit : Bastien Reveco

Nous commençons donc cette seconde journée avec Balladur, corps à deux têtes villeurbannais aux préférences noise et pop. S’il nous était possible de déceler quelques pointes de douceur dans leur premier album, « Plage noire, plage blanche », avec des morceaux comme « Blue Wind », la performance qu’ils offrent au Paris Psych Fest est plus à situer du côté brouhaha. Le son est mal réglé sur scène et les folies électriques de la guitare poussent nos tympans à se renfermer sur eux-mêmes. Les voix s’effacent derrière ce rideau de cacophonie et le show se teinte d’une uniformité assez désolante, malgré quelques pauses permises grâce à des morceaux comme « Linda ». Nous attendions des soulèvements, mais le public reste inerte, affalé sur des transats ou comatant devant la scène. Difficile entrée en matière, sachant que le show offert à la suite par Ulrika Spacek n’a pas permis de sauver la mise.

Nous retrouvons le même public inerte, catatonique à cause d’une uniformité peu souhaitable. Le son sur scène est toujours aussi limité, et si la ligne d’horizon fuzz et reverb d’Ulrika Spacek plaît à l’écoute, en live, l’effet n’est pas le même. On s’ennuie ferme face à un groupe qui s’endort littéralement sur place, et l’on se demande si la tête du guitariste ne va pas finir par se détacher à force de pointer vers le sol. « She’s a Cult », « Beta Male » ; tout s’assemble et se ressemble sur cette scène qui ne semble pas favorable aux groupes qui s’y ébrouent. Nous courrons donc vers la scène intérieure, plus agréable car plus intimiste et mieux gérée techniquement, recouverte de boiseries du sol au chapiteau.

Les corps se rapprochent dans cette atmosphère confinée pour découvrir Tomorrows Tulips, deux Américains aux préférences garage pop signés chez le très réputé Burger Records. Retardé de plus d’une demi-heure à cause d’une petite inondation, le concert commence sous des auspices favorables. Ce sont trois figures adolescentes que l’on voit investir la scène, silhouettes lancinantes et attitudes désinvoltes. Doucement mais sûrement, le groupe prend sa place avec patience. Nous débutons tranquillement sur des morceaux délicats comme « Flowers on the Wall ». Les éclairages répondent à cette douceur chimérique en habillant les membres d’étoiles dorées ou de rayures étudiées. En fond, une iconographie digne de la génération Y, captures d’écran et autres joyeusetés. Le public est réceptif à cette atmosphère éthérée et vibrante, dodeline et s’anime sans peine. Bien meilleur que sur la scène extérieure, le son permet de mettre parfaitement en valeur la montée en crescendo que nous offre le groupe : l’énergie gagne en puissance pour atteindre un seuil fort et sublime avec « Living Room Sensative » et ses presque six minutes de délirants solos instrumentaux à la limite du stoner. Nous sortons du concert tout vibrants et électriques, et nous  commençons enfin à goûter aux plaisirs d’un festival qui se finira en beauté avec le délicat Jacco Gardner.

En cela, l’événement est vraiment bien organisé. L’alternance entre concerts très puissants (Tomorrows Tulips, Night Beats) et sets plus doux (Woods, Jacco Gardner) permet des montagnes russes de sensations éclectiques et nourrit surtout un dynamisme qui maintient l’intérêt en éveil. Après, donc, les envolées folles de Tomorrows Tulips, on redescend pour quelques instants sur terre, le temps de rejoindre la scène extérieure et le groupe Woods. À travers un folk joyeux et éclairant pour adoucir les impressions du concert précédent, les membres nous offrent une prestation des plus sympathiques. Tous nonchalants, ils maîtrisent pourtant parfaitement leurs allées et venues entre des parties instrumentales très rythmées et des moments chantés plus vaporeux. Le son est déjà meilleur que pour Balladur ou Ulrika Spacek, et nous apprécions l’arrivée d’instruments tels que le saxophone. Les montées folk de « Sun City Creeps », et les claviers psychédéliques de « Leaves Like Glass » nourrissent avec une mesure parfaite des spectateurs ravis !

Nous retournons en intérieur pour découvrir Night Beats et son rock garage et psychédélique. À peine arrivé dans la salle, nous comprenons la différence : le public de fans est beaucoup plus important que pour les concerts précédents et se presse avec joie près de la scène. Et à raison. Le concert est électrique, les gens déchaînés (premiers pogos de la journée !) et le groupe enjoué sur des morceaux qui font son succès, comme l’électrique « As You Want » ou le psychédélique « Power Child ». On vibre, on danse, on a les tympans qui résonnent pendant les 45 minutes de performance. En sortant, on en tremble encore, préparés à accueillir la douceur de Jacco Gardner, qui assure le dernier concert sur la scène principale extérieure.

Il fait à peine nuit quand nous rejoignons la scène, doucement étourdis par Night Beats. Jacco arrive, charismatique, délicat dans ses gestes et assuré par la présence de ses trois musiciens. Et c’est parti… pour le décollage vers la planète psyché la plus marquée depuis le début de la journée : « Hypnophobia », « Clear The Air », « Where Will You Go »… Jacco Gardner est à son meilleur dans ses habits musicaux psychédéliques, portés par des claviers ecclésiastiques parfaitement mesurés. Le son sur scène est bon, Jacco est magnétique, le public hypnotisé, le festival terminé. En un battement de cils, son concert est passé, apothéose sublime pour un festival mitigé.


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Julie Albesa

Étudiante en Lettres et mélomane invertébrée, je me démembre en sirotant des cocktails de mélodies éthérées, riffs échaudés et cotonnades étoffées