[LP] I Have A Tribe – Beneath A Yellow Moon

« Chaque soir, la lune au-dessus du studio était belle et jaune », déclare Patrick O’Laoghaire. Ces soirs où nous nous imaginons l’astre s’inviter fièrement sur la fenêtre de toit du studio. Ces soirs où sa douce lumière pénétrait le cœur de Patrick et ses musiciens. Jouant le plus souvent sur les marrées et sur l’humeur de nos nuits, la belle ronde s’impose désormais comme une muse et donne son titre au premier album d’un auteur-compositeur exemplaire de poésie : « Beneath A Yellow Moon » est un album pour et à l’image de la Lune.

I Have A Tribe - Beneath A Yellow Moon

La lune a bon dos. Certes, elle lui vaut une partie de son inspiration, mais quand même pas son talent lourd de complexité et d’ingéniosité. Au long de ses EP, nous avons entendu Patrick prendre son essor sur des mélodies de plus en plus singulières dans leur composition. La musique de cet Irlandais est dans la situation, elle naît du moment. Accompagné de Paul Savage à la production – à qui l’on doit des projets avec King Creosote, Mogwai et Franz Ferdinand entres autres –, l’intention du duo était déjà claire en entrant en studio : oublier le perfectionnisme et miser sur la spontanéité, magnifier l’instant. Décidément, ce schéma de production se révèle être très en vogue dans les projets indépendants actuels, car il capture ce charme de la vieille école dont tout le monde raffole, artistes comme public. Le préfabriqué des majors de l’industrie tire-t-il donc sa révérence ? Dans un sens, il faut croire que oui, bien qu’il reste encore des superproductions qui renflouent les caisses. En tout cas, dès le premier titre de l’album, « Passage » nous conforte bien dans cette réalité riche en surprises façonnables. Pour l’anecdote, en réécoutant cette chanson avec Paul Savage en studio, Patrick tapait sur le bord d’un verre en rythme et puis il a joué une note qui colla au morceau. Paul a posé un micro à côté du verre pour enregistrer le son, qui figure maintenant comme percussion sur l’album.

Au vu des résonances lyriques, il n’est pas surprenant que Patrick rapproche la musique de la peinture. Par exemple, l’énergique « Buddy Holly » (nom d’un chanteur, guitariste et compositeur  américain de rock’n’roll des années 40) est fondé sur un texte vieux de huit ans, qu’il a transformé en toile pour ensuite le peindre avec ses propres couleurs musicales. Avec la nature originale de ce premier opus, il était évident de retrouver une intense collection de couleurs sur la couverture, peinte par Dave Hedderman, artiste et ami proche du barbu. Il est également l’auteur du portrait de Patrick qui illustre son précèdent EP « No Countries ».

Ses chansons, qui paraissent toujours enveloppées d’un sourire, sont empreintes d’une certaine mélancolie qui roucoule dans le creux de sa gorge. Avec sa voix fluide et absorbante, Patrick O’Laoghaire fait sonner sa musique comme une vénération des choses et des personnes qu’il rencontre. Jusqu’à « Cuckoo », nous sommes immergés dans sa compassion, son innocence et son espièglerie : « Le truc, c’était de jouer avec l’abandon de soi, comme un gamin. » L’enfant en nous tous s’en voit ravi.

I Have A Tribe

« Beneath A Yellow Moon » d’I Have A Tribe, disponible depuis le 27 mai 2016 chez Grönland Records / [PIAS].


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Julien Catala

chroniqueur mélomane, amoureux des échanges créés autour de la musique indépendante