[Interview] Rover

De passage par le Chabada d’Angers dans le cadre de la tournée de « Let It Glow », Rover recompose avec nous l’itinéraire personnel et sensible de son second album. Trois ans après un premier disque éponyme au succès critique et public, Timothée Régnier est parti enregistrer dans un ancien pensionnat transformé en studio analogique dix nouvelles pistes fascinantes et envoûtantes. Il revient sur l’écriture de ce disque, sur le récit qu’il a souhaité construire et sur son approche de la scène et du public.

crédit : Claude Gassian
crédit : Claude Gassian
  • Bonjour Timothée. Il s’est écoulé plus de trois années entre la sortie de tes deux albums « Rover » et « Let It Glow ». Peux-tu me parler du processus d’écriture de ce second album ? 

Je me rends compte que ma façon de procéder lorsque j’écris pourrait s’apparenter à une forme de recueillement ; c’est dans la solitude que je rentre en relation intime avec la musique. J’aime ces moments, car ils m’échappent et je suis à la fois acteur et témoin de la naissance des chansons.

  • As-tu souhaité surprendre ou plutôt inscrire « Let It Glow » comme une suite narrative à « Rover » ?

J’ai surtout souhaité ne pas me poser ce type de questions, je pense. Les chansons sont venues naturellement et sans violence. Avec le recul, il me semble que c’est un disque qui s’inscrit dans une continuité tout en reflétant l’évolution naturelle que la vie impose. C’est une photographie de qui je suis à un moment donné.

  • De quelles rencontres, de quelles conversations voire de quelles écoutes essentielles as-tu nourri cet album ?

C’est très mystérieux le terreau d’un disque, les strates émotionnelles que la vie offre se retrouvent très souvent de façon inconsciente dans les chansons. C’est à la fois complexe, car cela m’échappe (et c’est tant mieux) et très logique étant donné que la composition est souvent un lieu où l’on exprime l’inexprimable.

  • Une question qui peut prendre plusieurs de sens : à qui s’adresse « Let It Glow » ? Singulièrement et universellement ?

Il s’adresse à moi avant tout, c’est le meilleur moyen de faire un disque à la fois honnête et qui me plaît, ensuite il aura probablement plus de chances de résonner auprès des autres avec la même émotion.

  • La pochette est souvent le premier contact que l’auditeur a avec un disque, même à l’ère du numérique. Le ton est austère, le fond rouge accroche le regard, tes lunettes d’aviateur masquent ton regard… Qu’as-tu voulu raconter à travers cette pochette ?
crédit : Julien Mignot
crédit : Julien Mignot

La pochette n’est pas dans le récit. Elle est autonome et brute. C’est ainsi que j’aime les choses en règle générale. C’est une photo prise par Julien Mignot, un photographe atypique et très talentueux. J’aime l’épure de cette pochette et sa force. L’épure et la force sont aussi présentes dans le disque, c’était donc cohérent.

  • Certains disques peuvent s’écouter distraitement, en diagonale. J’ai l’intime conviction qu’on ne peut pas couper à une écoute appliquée, sinon attentive de « Let It Glow » pour en saisir toute la portée, pour embarquer pleinement dans ton univers. Cela témoignerait-il d’une intention de porter un récit complet sur tes dix titres ?

Je suis très attaché au format « disque », c’est la toile du peintre en quelque sorte. Il propose un cadre, un terrain de jeu. Chaque titre se nourrit et porte le fil rouge du disque. J’aime les disques qui imposent l’écoute, je prends donc cela pour un vrai compliment. Merci.

  • Tu es parti enregistrer cet album en Bretagne, dans un studio à l’équipement exclusivement analogique. Qu’es-tu parti chercher ?

La passion des personnes (Christophe et Marie Chavanon) qui ont construit ce lieu, Kerwax, un studio fantastique où chaque élément nourrit la musique et provoque la magie. La Bretagne a également contribué au plaisir de s’abandonner pleinement à la musique, je m’y sens bien.

  • Quand on est acteur de son projet, doit-on redevenir spectateur de son art pour mieux l’offrir ?

C’est une forme d’auto critique saine que de devenir spectateur de son art, oui. Il faut cependant rester spectateur et non-admirateur sinon les choses tournent au vinaigre…

  • Pour poursuivre sur cette question du regard du public, comment as-tu pensé la transition du disque vers la scène ?

Avec la même démarche, car c’est ainsi que ma passion s’exprime le mieux. De la musique, jouée par des êtres humains sur de vrais instruments. Le danger de la musique live rend les concerts électriques et uniques. C’est grisant de partager un moment aussi précieux avec le public, en acceptant les accidents et les moments en suspens.

  • D’Antony Hegarty à Neil Hannon, de John Lennon à David Bowie, ta musique se nourrit d’œuvres, mais aussi de personnages. En ce sens, Rover est-il étranger à la personne privée que tu es, est-il un toi personnifié ou un miroir de ta personnalité ? 

Je l’ignore, il faudrait que je lui pose la question…

crédit : Julien Mignot
crédit : Julien Mignot
  • L’artiste qui va ouvrir pour toi à Angers, Romain Lallement alias Lenparrot, partage avec toi une sensibilité vocale capable d’allier la finesse d’un chant à une forme de gravité. Quel regard portes-tu sur son projet ?

En toute honnêteté, je ne connais pas son projet. J’ai hâte de découvrir sur scène du coup. J’ai eu de belles surprises depuis le début de la tournée avec les premières parties, ça devrait être super je n’en doute pas.


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques