[LP] Futsu – Body Island

Bienvenue sur une île paradisiaque aux mille couleurs musicales, pour une soirée animée et festive autour d’un feu de camp rock en pleine effervescence.

Futsu - Body Island

Une ambiance échevelée, addictive et follement entraînante ; c’est ce que les Parisiens de Futsu nous invitent à partager avec « Body Island », disque fiévreux, intelligent et motivant. Mais pas seulement ; car derrière ses atours chatoyants et multicolores, le disque dissimule une profondeur de composition incroyable ; comme si le fait de maîtriser l’énergie organique des chansons résidait avant tout dans la compréhension de cette dernière. Les instruments ici invités laisseraient, au premier abord, suggérer un folk doucereux et langoureux, risque souvent pris par de nombreux artistes. Mais pour le groupe, il convient avant tout de créer des titres qui titillent l’oreille interne autant qu’ils invitent à la danse, apposant alors des arrangements éclairés et révélateurs de l’imagination sans limite de concepteurs scrupuleux autant que motivés à agiter nos membres, de jour comme de nuit.

On passe ainsi, en un éclair, de temps excitants et aveuglants (Body Island Body Shapes, Mind Over Matter) à des pauses bercées de flûtes (Gift Horse) ou de cordes bientôt prolongées par la plainte nocturne d’un accordéon (Sand & Noise). C’est ainsi que l’on doit accepter de se laisser entraîner dans l’esprit malin et complexe de Futsu ; en croyant avoir trouvé l’essence de leur musique pour mieux se laisser surprendre et finir en sueur sur les planches déjà baignées de transpiration, les victimes précédentes d’une telle drogue de l’esprit ayant épuisé leurs capacités physiques. Les chœurs adoucissent des instantanés funk et soul (Mind Over Matter), des violons transforment un moment folk inattendu en expérience psychédélique emplie de visions reposantes et pastels (Falling Up) ; là où d’autres auraient sombré dans un chaos indigeste et sans saveur, l’entité parisienne a appris à ne pas se laisser emmener dans le chaos trop bruyant de l’exagération. Entre le jazz délicatement saturé de l’impressionnant « Shadowboxing » et les fulgurances incontrôlables de « Mechanical Bride », on se sent happé dans un univers aux formes aguicheuses et vives, qui secoue nos neurones pour mieux les capturer et ne plus les lâcher.

Et les échanges vocaux, véritables tours de force entre le timbre affirmé de l’Australien Mike Marques (figure de proue de ce bateau sans véritable capitaine) et Cécile Mirtin, ne sont pas en reste dans ce maelström presque maniaque, mais terriblement motivant. Les mélodies s’entrecroisent, se mélangent et se répondent avec une intensité magnifique, donnant une valeur toujours plus grande aux chants de l’exaltation et de l’exutoire. On ressent pour ce disque un besoin de le serrer contre soi, une dose d’affection et de plaisir qui ne peut que faire naître la nécessité de l’écouter encore et toujours. Marcher avec lui dans les rues bondées d’une grande ville, avec cette envie urgente de monter sur des manèges, de tourner autour des lampadaires et de sauter dans les flaques sans se soucier du regard des passants. Entre innocence de l’enfance et maturité des compositions, « Body Island » nous aide à concrétiser nos désirs les plus secrets et à nous sentir enfin vivants. L’allégresse s’unit au sublime, à la réalité sensible des lieux traversés ; à la volonté de nous délecter de bonbons acidulés et piquants au détour d’une confiserie devant laquelle nous n’osions auparavant pas nous arrêter, par peur du qu’en-dira-t-on, mais dont les néons fluorescents nous hypnotisent et nous attirent. Après tout, pourquoi ne pas saisir une telle explosion de bonheur alors qu’elle est à portée de main ?

crédit : Karasu
crédit : Karasu

On ne peut que remercier Futsu pour ces temps de répit et d’exultation dans le marasme du quotidien ; et surtout, pour ce désir fou d’éclairer de mille feux les paysages gris des habitudes qui viennent plomber nos journées moroses. Un grand sourire sur un visage qui s’illumine enfin.

« Body Island » de Futsu est disponible depuis le 15 janvier 2015.


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Raphaël Duprez

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