[Live] Beaucoup d’amour party #1 au Badaboum

« Beaucoup d’amour », c’est le nom de la bien-nommée soirée du jeune label Beaucoup Music organisée dans la chouette salle parisienne du Badaboum, afin de promouvoir la sortie de sa première compilation « Beaucoup d’Amour #1 », soutien brillant et classieux à une pop à la française en pleine renaissance.

Beaucoup d'amour party #1 - Beaucoup Music

Quoi de mieux que d’inviter des artistes présents sur la compilation pour animer la soirée ?
Il y aura ainsi Cléa Vincent, forte de ses 2 premiers EPs sortis cette année : « Non mais oui » et ses deux  volumes. De la chanson française bien sûr, goûtant par moments au disco et admirablement servie par les cuivres ; un projet somme toute dansant et respirant la joie et la bonne humeur. Caïman Philippines ensuite, dont le dernier single, « A Glorious Fall / Sperne », laissait présager d’une pop expérimentale psychédélique. Enfin, A Rainmaker et sa pop très cool qui s’écoute en boucle dont nous ne tarissons pas d’éloges concert après concert. Un point commun entre ces trois groupes : leur jeunesse, souvent prometteuse. Pour conclure la soirée, Beaucoup Music nous réservera un DJ set bien servi par trois challengers : Love On The Beat, Golf et Walter Sobcek. On parlera plus loin de l’ambiance qu’ils ont mise.

Pour démarrer la soirée, l’agréable chant en français de la douce Cléa Vincent donne le tempo. Une trompette s’invite sur la gauche ainsi qu’un bon clavier. Si le Badaboum est connu pour sa programmation électro, on apprécie pour le coup la qualité de la sono et une écoute qui se fait agréable. Sur « Le grand méchant loup », les chœurs suivent Cléa dans les aigus. L’esprit est simple et jovial à la fois : oui, la légèreté est de mise.

Sur une reprise de  « Je l’aimais » de France Gall, on comprend immédiatement d’où viennent les références du projet. On parlera donc d’une pop française aux paroles sans doute ingénues mais sympas à l’écoute, même si par ce temps un peu frisquet, on craint que le mièvre vienne frapper à la porte. Fort heureusement, loin de simplement se reposer sur la voix de sa chanteuse, les musiciens portent admirablement le projet jusqu’à faire oublier par moment sa présence.
Du bon esprit, il y en a : les petites blagues fusent, les sourires ne se cachent pas et les chœurs aigus prennent le ton de la rigolade. Pas de prise de tête pour ce jeune groupe. L’instrumentation ferait parfois penser à un Lescop. On aimerait toutefois qu’elle s’affermisse et se libère de Cléa Vincent, notamment que le bassiste, un peu timide le long du show et faisant preuve d’un excès de zèle, se lâche davantage, à l’inverse d’une belle présence du saxophoniste.
Une agréable découverte somme toute, dont la saveur prend tout son goût en live, donnant une seconde vie aux textes de Cléa Vincent.

Caïman Philippines. On commence par une salle enfumée et une instru pas commode : des violons sur un fond brutal de basse-batterie. C’est confus par ici. L’atmosphère se calme alors que le chant fait son incursion. De jolis chœurs feraient penser à Oasis. Sûrement un travail titanesque, une musique léchée et fort recherchée… Toutefois, bien que les musiciens soient au taquet – le bassiste assure particulièrement – on a la forte impression que nos planètes diffèrent.

On passe de moments boogie disco qui tabassent, pendant lesquels un public amorphe danserait les bras ballants, à des instants autrement expérimentaux et difficiles d’accès. Une musique multiforme, qui pourrait, en vérité, se rapprocher d’un Giorgio Moroder ou d’un Cerrone ; elle se danse mais difficilement, a contrario d’un Boney M. On pourrait donc la qualifier de baroque, tantôt obscure, tantôt disco frenchie à la manière des Rita Mitsouko. Un beau bordel organisé pas facile d’accès, qui mérite sans doute d’être huilé encore pour gagner en puissance d’évocation et faire danser les foules. À leur décharge, l’horaire n’était peut-être pas le bon. En tout cas, Caïman Philippines mérite qu’on y prête une oreille, mais une oreille concentrée et avertie afin de percer la carapace d’un certain obscurantisme parfois abscons.

A Rainmaker. Parler d’eux, ce serait se répéter. On dira simplement et sobrement que l’essai a été transformé, que les promesses d’un dimanche à Paris ont été tenues haut la main. Capucine, au chant, encore une fois boule disco, réclame « des effets » à l’ingé son entre deux musiques. Un « Anchor » qui déchire comme on pouvait s’y attendre. Simon Richard de Simon Says, qui suit le projet depuis ses débuts n’hésitera pas à le clamer : « c’est leur meilleur concert ».

Un piano s’invite sur « Stripping Dawn » ; c’est beau. Un nouveau morceau avec une guitare toujours funky, une pop suave avec de petits échos, une batterie un peu à la Pimp dans sa Corvette, un saxo qui joue les guests et une batterie qui se donne jusqu’à l’effondrement. C’est intensément suave . La chanteuse nous propose une chorégraphie minimale vers la fin du show : de simples haussements d’épaules. L’image est dure à retranscrire mais on sent un groupe soudé dans quelque chose de positif. Ils s’amusent et  ça fait plaisir à voir et à vivre.

Enfin, on quitte les sessions lives pour se donner corps et âme le reste de la soirée sur la piste de danse, au son des DJ sets. Les premiers, Love On The Beat, avec leurs barbes fournies, s’invitent ou plutôt s’imposent à base de gros slaps de basse. Le set passe bien, les morceaux sont peut-être un peu trop  écourtés ; on passe de Sister Sledge à Will Smith à la vitesse du son, de Old Dirty Bastard à douze milles autres titres bien fougueux qui déchaînent la foule. It’s a « Dance Freak ». Les gars sont détendus et passent les musiques tour-à-tour entre deux ou trois blagues.

S’ensuit Walter Sobcek ; et on serait bien tenté alors de s’enfuir. On est passé d’un esprit bon enfant à quelque chose de plus profond, instrumental et moins revival des surboums d’antan.

Le dernier participant, Golf, rameute la foule. Si la piste de danse était squattée par quatre énergumènes à la fin du set précédent, c’est toute une famille qui sort de terre pour venir se déhancher. L’ambiance est parfaite, même si à cette heure-là, on admettra qu’il est bien compliqué d’avoir un souvenir précis de la chose, la fatigue se faisant sentir jusqu’à la fermeture qui nous aura tenu éveillés jusqu’à 1 heure 45 du matin, pas une minute de plus.

En bref, si la compil est à l’image de la soirée, elle vous rhabillera pour le mois de décembre et réchauffera vos cœurs glacés par les vents nordiques. Les concerts ont fait leur effet : le bon esprit était là et il n’y a finalement pas eu de déception quant aux différentes prestations. La découverte d’une Cléa Vincent qui prend la relève de la chanson française ; la mise en intrigue de Caïman Philippines qui sans doute mérite une oreille attentive ; la confirmation du talent de A Rainmaker. Les DJ sets enfin : de la danse en veux-tu en voilà. Beau programme.


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Nils Savoye

Mais de quelle situation cette musique pourrait-elle bien être la bande-son ? Réponse d'un étudiant en histoire.