[LP] Poppy Ackroyd – Feathers

Aussi léger et doux que son titre le laisse entendre, « Feathers », le second album de l’Anglaise Poppy Ackroyd, est un bataillon d’instruments à clavier et de strates mélancoliques.

Poppy Ackroyd - Feathers

Si charmant et léger soit-il, le nom de Poppy manque cruellement de crédibilité. Rien que pour sa traduction française, « coquelicot », et aussi pour sa locution franchouillarde tout en i et en po. Les a priori ont bon dos puisque cette Poppy-là ne fait ni dans le tricot ni dans la fleur des champs. Elle joue sérieusement de plusieurs instruments et s’essaie au balancement d’humeurs fragiles. On tombe naturellement démuni et abasourdi, dans les bras de cette enchanteresse.

Poppy Ackroyd est une compositrice londonienne actuellement installée à Brighton. Entraînée au violon et au piano depuis sa plus tendre enfance, elle étudie la composition à l’université d’Edinburgh, décroche son Master et commence à travailler dans plusieurs domaines en créant des bandes-son pour le cinéma, la danse et le théâtre. Tout en domptant sa solitude, elle sort un album visuel, « Escapement Visualised », au noir et blanc hypnotique qui rappelle sans conteste les dernières vidéos d’Agnes Obel, dont la musique n’est d’ailleurs pas si éloignée de la sienne. Poppy soulève une énergie contemporaine qui veille à développer son propre style, sa propre marque, en utilisant une plastique sonore déviante et originale. Le minimalisme et l’atmosphérique tiennent une place prépondérante dans sa musique, tous deux soutenus par un mélange de textures instrumentales : piano, violon, harmonium, clavicorde, clavecin, épinette, ainsi que de légères touches électroniques. Tout ceci est animé et délicieusement contrôlé par sa nature curieuse et autodidacte : elle a passé beaucoup de temps dans les musées à démonter et décortiquer différents pianos pour comprendre leurs mécanismes, ce qui lui a donné une liberté totale sur sa musique et sur l’étude d’une cinquantaine d’instruments à clavier des XVIe et XIXe siècles.

Dernier résultat en date : le très beau « Feathers », album fait de plumes noires, produit dans une multitude de timbres et de couches rythmiques ; d’où le nom du morceau d’ouverture « Strata » définissant à lui seul les strates sonores de l’album. Outre la nature classique des instruments, le champ d’enregistrement revêt les atours d’un piètre naturaliste capturant au maximum les bruits du quotidien et donnant alors à l’album une force cinématographique et thématique : des carillons d’horloges murales dans « Timeless », le bruit du trafic autoroutier dans « Roads » et le son des vagues sur les galets de la plage de Brighton, où l’on imagine le Brighton Pier s’élever d’entre les eaux.

crédit : Kat Gollock
crédit : Kat Gollock

La poétesse Emily Dickinson a écrit : « L’espoir porte un costume de plumes ». Et Poppy Ackroyd, sous le charme de ses mots, s’est inspirée de cette citation pour parsemer ses plumes d’amour, de chagrin et de grandes espérances.

« Feathers » de Poppy Ackroyd, disponible depuis le 14 novembre 2014 chez Denovali Records.


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Julien Catala

chroniqueur mélomane, amoureux des échanges créés autour de la musique indépendante