Au coeur du festival Visions

Vendredi 9 août / Jour 1

Il fait beau ce vendredi 9 août aux abords de la baie de Morlaix. On  vient d’arriver au parking du festival Visions à Plouezoc’h après avoir écouté la compil’ des Disques Anonymes pendant 2h et quelques de route. Il est environ 16h30 et avec les collègues Aloïs et Mika nous trouvons que les murs en pierre du camping avec la grille entrouverte ça fait très cimetière. Tout en pente de sorte que l’on a une très belle vue de la mer. On a rarement vu mieux comme cadre pour un festival.

Visions

Après avoir regardé où tout le monde plantait sa tente, pour pas se prendre le soleil à 8h du mat’, nous nous dirigeons vers le domaine de Traon Nevez où auront lieu les concerts un peu plus tard. On reçoit nos pass et Lisa, l’attachée media, vient nous chercher à l’entrée pour nous faire visiter un peu l’endroit. Sur la gauche se situe la grange (Barn Club) qui accueillera dans la soirée la sélection électro de Vielspaß. Sur la droite, un barnum pour les différentes activités proposées l’après-midi. En rentrant un peu plus dans le prolongement de la grange, on trouve les bâtiments principaux de la demeure, toute en pierre, dans lesquels on pourra déguster des galettes saucisses BIO, frites BIO et autres trucs BIO dans le genre. Juste à côté du barnum se situe un bâtiment carré où se sont installés plusieurs créateurs de vêtements, les sérigraphies du collectif parisien Arrache-Toi Un Œil, etc. ainsi que le merchandising et l’espace média où se passeront les interviews durant le week-end. En face de ce même édifice se trouve la scène que l’on peut apercevoir des fenêtres.

Une fois la visite terminée, un monsieur de l’organisation nous dirige vers l’entrée pour nous proposer d’aller manger des huitres et boire du vin blanc gratuitement. Le but étant de vider le site, ouvert pour des activités gratuites l’après-midi, afin de préparer la transition avec les concerts payants du soir. Comme vous pouvez l’imaginer, c’est une très belle technique, personne ne crache sur un verre de blanc et quelques huîtres quand c’est gratuit !

Baston / crédit : Aloïs Lecerf
Baston / crédit : Aloïs Lecerf

Nous retournons un peu au camping histoire de fignoler nos questions pour les interviews tout en mangeant nos sandwichs. Au passage, on se fait avoir comme des bleus par l’apéro et nous loupons de la sorte le groupe Hannah. Nous arrivons donc pour le second groupe Pastoral Division. Ça ne bouge pas trop ; sans doute le manque de public à cette heure-ci n’arrange pas l’ambiance, mais ça ne donne pas envie d’écouter chez soi.

Heureusement, il y a le groupe Baston pour nous faire bouger les fesses juste après avec leur garage rock. Dans ce style-ci pas évident de se démarquer, mais ça reste efficace. On retrouve quelques accents à la DIIV au niveau de la guitare. La voix est bourrée de delay et d’effets de reverb divers de telle sorte qu’on ne distingue pas les paroles, mais ça n’est pas grave, pas besoin de ça pour se retrouver à taper du pied en rythme.

Interview Baston

Lonely Walk s’installe pour effectuer la transition musicale du jour à la nuit. Vu leur style, ça leur va bien. Nous nous rapprochons donc avec nos bières (comme tout bon festivalier). Le concert commence, on a un peu l’impression de voir les Black Angels s’essayer au shoegaze au début et c’est assez sympathique. On passe le reste du concert obnubilé par le regard du chanteur qui fait les cent pas entre les chansons pour se planter devant le micro et capter l’attention du public avec ses grands yeux exprimant la rage et la tristesse à la fois sans avoir besoin de trop bouger le corps. On commence à ressentir un côté A Place To Burry Strangers dans leurs compositions jusqu’à la conclusion épique du concert dans un nuage de larsen et de nappes de synthés accompagnés de lumière stroboscopiques.

Lonely Walk
Lonely Walk / crédit : Aloïs Lecerf

Pas le temps de reprendre une bière, Lisa nous appelle pour nous dire que Dead est libre pour une interview donc on remonte à l’espace média.

Interview de Dead

On enchaine sur Tresors qui est un vrai scandale électro. Les deux acolytes sont plus alcoolisés que la plupart du public contrairement à ce qu’il semble penser en sortant « De toute façon, les gens sont trop bourrés, ils verront rien » lorsque l’un des deux est obligé de régler les pédales d’effets de l’autre. Au final, on rigole assez de leur condition surtout quand ils nous sortent des phrases comme : « La prochaine chanson, c’est notre morceau métal » ou encore « On voudrait remercier les Disques Anonymes ainsi que le mec qui m’a apporté un Kleenex pour que je me mouche et celui qui a la casquette à l’envers aussi, après c’est Dead… Ah non en fait c’est The Dreams et après Dead ». On a l’impression d’avoir vu une espèce de gros foutage de gueule pendant lequel on a bien rigolé, mais on ne peut définitivement pas prendre ce groupe au sérieux pour leur musique qui était pour le coup assez scandaleuse.

Tresors
Tresors / crédit : Aloïs Lecerf

On va s’assoir un peu pendant l’entre concerts pour manger une galette saucisse et discuter de ce concert, et on ressent un peu les mêmes échos autour de nous. Visiblement tout le monde va à la Route du Rock aussi et on se demande ce que Tresors va bien faire là-bas.

On se relève pour aller voir The Dreams, venu de Strasbourg en train pour l’occasion avec Scorpion Violente.

« On pourrait avoir un kebab sauce blanche » – « Ouais et un peu plus de voix dans mon retour »

On les attendait avec impatience, et c’est un savoureux mélange de boite à rythme tribale, guitare aux rythmes reggae bourrée de delay et de chant décalé et souvent en yaourt, servi sur un petit plateau doré. On a les yeux qui brillent, y a de la flûte, des maracas, le regard hypnotique d’Armelle, des danses marrantes. Au final, on assiste à quelque chose d’assez psychédélique sans le vouloir. Ils se regardaient à chaque morceau pour régler les tempos avec des hochements de têtes, un morceau pas joué parce qu’il s’en souvenait plus, mais toujours une musique dansante et hypnotique, qui te fait partir en Jamaïque de l’Est. Ils nous gratifient même d’une reprise de Metallica d’après leurs dires, mais on a rien reconnu.

The Dreams / crédit : Aloïs Lecerf
The Dreams / crédit : Aloïs Lecerf

On les a rejoints juste après pour une interview.

Interview The Dreams

Après ça, la conversation a continué pendant pas mal de temps en partant dans des sujets divers et variés. Il a quand même fallu arrêter à un moment pour aller se reprendre une bière et voir Dead par la même occasion.

Ça commence, on se prend un gros mur du son shoegaze dans la gueule qui au final semble assez vide dû sensiblement au son du site pour ce genre de musique. On remarque quelques ressemblances par moment avec The Soft Moon. Cela ravira les amateurs du style, mais n’avait pas trop sa place dans la programmation.

On était tous fatigué, mais Quentin est resté boire une bière en attendant DOIST! et s’est barré après deux morceaux d’électro basique.

Rendu au camping nous avons essayé de dormir, mais c’était très dur à cause des voisins qui faisaient beaucoup de bruit notamment avec leurs ironiques :

« Vos gueules, y’a des gens qui dorment ».

Mais ça n’était pas le pire, le pire c’est qu’ils se sont réveillés à 9h pour refaire la même.

On se lève donc vers 10h.


Samedi 10 août / Jour 2

On est allé chercher des sandwichs dans un bled du coin. À la caisse se trouve un vieux barbu avec des bouteilles de vin et des bières.
Un écriteau nous informe qu’on peut acheter des alcotests à la caisse, on est toujours en Bretagne, c’est bon. On recroise le mec à la sortie, il essaye de tout caser dans le coffre de son scooter, mais on sent l’opération assez difficile. On revient au camping avec My Disco Jacket à fond là-dedans. Les mecs de The Dreams se boivent des bières sur un banc devant la mer, les vieux se promènent avec leurs chiens. Nous retournons à notre tente manger un peu et parler un peu des groupes à interviewer le soir. L’après-midi, les enfants pouvaient assister à des ateliers tels que « Mon premier CD électro » (entre autres) dans lequel des artistes les initiaient aux rudiments du triturage de machines.  On avait aussi le droit à des burgers maison de Amaury’s Kitchen sur fond de DJ set de Piranha et Pocket Burger. On pouvait également acheter en souvenir un burger et une frite ainsi que des piranhas cousus dans du tissu. Forcément on a repris des huitres et du vin blanc par la suite puisque c’est gratos et cool.

Super Crayon / crédit : Aloïs Lecerf
Super Crayon / crédit : Aloïs Lecerf

Pearl Harbor étant annulé, Super Crayon joua en premier. On les attendait surtout pour le titre « Je préfère les tétraèdres ». Ils se sont entourés du bassiste faisant partie de Splash Wave qui a l’air perché la plupart du temps. Nicolas aux machines a l’air de s’en foutre un peu de ce qui se passe et Corentine, pas plus grande qu’Avril Lavigne, te regarde avec son regard perçant qui te fait détourner le tien. Super Crayon est super brouillon quand même, mais c’est ce qui fait leur charme. Ils partent après 30 secondes de blanc sur un « Salut, c’était cool, merci ». Pour résumer, c’est débile et trop cool !

Interview Super Crayon

Au passage, c’est eux les mecs qui ont fait du bruit la veille. Pour le coup, on leur a offert le prix Sacha Distel du groupe qui fait plus de bruit au camping que sur scène (Sous la forme d’un 45 tours de Sacha Distel qu’on a tagué).
(D’ailleurs, ils l’ont perdu durant le week-end… si quelqu’un le retrouve !) Quentin a recroisé Corentine aux toilettes qui lui a dit

« Ouais désolé, on était pas en forme pour l’interview, désolé pour le bruit, mais par contre, c’était pas nous à neuf heures ! ».

Le temps d’une bière et c’était déjà Benjamin Fincher. Pop song mélodieuse accompagnée de violoncelle par moment. Parfait pour entamer la soirée.  Malheureusement, on aura pu rester que deux morceaux dû à une interview planifiée à ce moment-là.

Interview My Disco Jacket

Interview Tristesse Contemporaine

On se dépêche de redescendre, de reprendre une bière, rouler une clope et se poser tout devant pour la demi-heure qu’il reste au concert de My Disco Jacket. Assez sage en interview, il se révèle sous un autre jour sur scène. On ne le reconnait plus, il saute de partout. Il a beau être tout seul, on ne se fait chier à aucun moment. Quelques accords et bends à la guitare nous font même penser à du Pixies parfois.

My Disco Jacket / crédit : Aloïs Lecerf
My Disco Jacket / crédit : Aloïs Lecerf

Le temps de reprendre une bière et c’était déjà The Black Regent, le groupe du patron des Disques Anonymes. On a le droit à de l’électro psyché avec un visuel de losange et de feuillage sur des écrans sur les côté et en fond de scène. Les synthés de leur titre « Spring » font même penser à « Sorry Angel » de Gainsbourg ainsi qu’un côté musique de film français. C’est assez hypnotisant à regarder, mais sans le visuel ça ne serait pas du tout la même chose. Le fait d’avoir un batteur avec de la reverb sur ses beats avait aussi un côté intéressant.

The Black Regent / crédit : Aloïs Lecerf
The Black Regent / crédit : Aloïs Lecerf

On enchaine sur Tristesse Contemporaine et leur show très pro. On s’attendait plutôt à des chansons assez répétitives, mais on a été agréablement surpris. Le chanteur, muni de son masque d’âne, crée les mélodies sur un beat et se fait suivre par le clavier et la guitare à la Black Angels. Malgré les compositions riches, le live commence à devenir ennuyeux vers la fin. Ils feront trente minutes de concert, car le chanteur quittera la scène pour aller chercher dans le public l’enculé qui lui a balancé du ketchup à la gueule contre un billet de 50 balles. Il ne le trouvera finalement pas, mais on se sera bien marré, car pour 50 balles, on l’aurait fait aussi.

Le tremsps duine biuerre et c’est déjà Scorpion Violente qui fait sauter l’installation deux fois de suite (On apprendra plus tard qu’en fait, ça ne vient même pas d’eux, mais d’un court-circuit sur une machine à fumée). Tu danses comme un fan et t’as l’impression que tout le monde est dans l’ambiance. Nafi est toujours à l’arrache et Thomas, son acolyte en lunettes de soleil, ne bouge pas trop en fumant clope sur clope. Pendant le concert, quelqu’un nous fait des bisous-surprises dans le cou. On se retourne pour se rendre compte que ça n’est autre que le batteur de Baston avec qui Quentin collaborera sur deux ou trois bisous-surprises parmi les gens du public. Scorpion Violente finissent par un morceau de 20 minutes qui fera se vider un peu la place, mais nous on aime bien.

On se fait embrigader pour aller faire la fête au camping loupant donc Splash Wave.


Dimanche 11 août / Jour 3

La journée du dimanche sera un comatage total. À 18h, cap sur Morlaix pour essayer de trouver une épicerie ouverte, on achète du pâté de foie avec quelques tranches de pain de mie et quatre bières ; tout ça pour la modique somme de 18 euros. On a même vu un clodo sur un banc, il dormait, il était fun. On rentre, on mange et on se fait inviter par Syd (cheveux décolorés, sweet Poivre et Blanc rose et son pantalon de pyjama gris/bleu) à prendre l’apéro avec d’autres gens, c’était cool, on a bu des bières. On y a croisé notamment le mec qu’on a baptisé King Krule juste parce qu’il est roux avec des lunettes de soleil.  Tout le monde est cool, ça parle surtout musique. On va finalement assister au ciné concert, sorte de film du dimanche du festival installé dans le Barn Club. Les canapés sont de sortie, la salle parait bondée, mais au final on doit être moins de 100 en tout sur le site. Le film, « They Live We Sleep » de Carpenter, commence et le rock prog de Robert Le Magnifique ne se fait pas attendre pour ponctuer chaque passage clef. C’est une combinaison intéressante et prenante même si on n’est pas forcément fan de ce style de musique au départ.

Robert Le Magnifique / crédit : Aloïs Lecerf
Robert Le Magnifique / crédit : Aloïs Lecerf

La soirée continue, on se retrouve à discuter de films divers et variés avec Nafi de The Dreams et Scorpion Violente (Ça va d’Enter The Void à Amer en passant par Death Proof etc…), on s’échange nos impressions sur le festoch, les groupes, l’ambiance. Mika et Aloïs iront ensuite interviewer Cardinale pendant que Quentin rejoindra la bande de l’apéro du début de soirée sous le barnum. Les canapés avaient été descendus et placés dessous. Étant donné que l’on n’était vraiment pas beaucoup, ça faisait comme si c’était l’anniversaire d’un pote et qu’il avait loué un gîte pour fêter ça. On s’est bien marré, goûté du pastis pas mal, vu de jeunes filles hystériques dont on se demandait ce qu’elles avaient pris.

Cardinale / crédit : Aloïs Lecerf
Cardinale / crédit : Aloïs Lecerf

Cardinale commence. De loin on a l’impression que la première partie est vraiment pop électro et qu’après on change de groupe pour aller plus vers des ambiances planantes et un peu rock psyché. Aloïs et Mika qui ont vu le concert le décrivent comme une espèce de BO de film. La batterie était apparemment assez puissante vu que quelques pierres tombaient des murs. Le Formica (Le DJ qui faisait les entres concerts durant le festival) assurera un live surprenant, doté de beat électroniques, de synthés, ainsi que de jolies mélodies de guitares, des sortes de balades électroniques qui te donnent envie de danser comme un foufou tout en buvant des bières (on l’avoue, on en a bu énormément). S’en suit un DJ Set électrisant de David des Disques Anonymes, qui finira par un bon morceau bien beauf à la française pour clôturer en beauté cette première édition du festival Visions.

On finira par s’agglutiner autour du bar pour entendre quelques anecdotes rigolotes. Par exemple celle des trois mecs qui ont couru et foncé dans les barrières du festival pour passer sans payer. Bref, on reboit quelques verres et puis c’est rendez-vous au camping pour un petit after où l’on chante un peu de tout n’importe comment. Cette nuit, c’est nous les connards du camping, et c’est cool d’être un connard en fait.

Le lendemain on ramènera Syd jusqu’à Rennes. On a failli le perdre sur une aire de repos, mais finalement on arrive à bon port. On se marre jusqu’au bout, il avait deux heures pour attendre son train, on espère qu’il est bien arrivé à Nantes…

C’est un peu la dépression post-festival qui s’installe, mais on se dit qu’on recroisera tout ce beau monde à la Route du Rock. On fait un campement Visions les copains ?

Les interviews viendront plus tard.

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Quentin Lejas

chroniqueur enthousiaste, épris de The Smashing Pumpkins et des Pixies