Electric Electric – Discipline

Alors qu’en France le débat autour du nucléaire est retourné se planquer dans les chaussons du discours politiquement inexistant, les Strasbourgeois d’Electric Electric nous livrent le morceau « La Centrale » qui détruit toutes les particules de nos membres.

Deuxième volet après « Sad Cities Handclappers » en 2008 d’une, on l’espère, longue série, le trio de transe sonique nous assène le coup de grâce. Leur nouvel album intitulé « Discipline » débouchera nos écoutilles dès le 3 octobre via les excellents labels Herzfeld, Africantape, Kythibong et Murailles Music qui arrivent à chaque fois nous en boucher un coin.

Autant dire que ce nouvel ensemble de petites perles proto-math-disco-core-et-tout-ce-que-tu-veux m’a littéralement posé les fesses sur la machine à laver en marche. Ainsi, le tube « La Centrale » (pour les aficionados) nous baffe dès son riff introductif. On s’attend à du gros son et du rythme foutraque, mais toujours au service d’une danse hypnotique, eh bien on est servi. Le chant peu présent n’est là que pour nous rappeler que les machines industrielles sont toujours, jusqu’à nouvel ordre, dirigées par des corps à base de chair et pourvues d’une conscience.

C’est en effet cet aspect industriel et machiniste (dans le sens ouvrier du terme) qui frappe au premier abord. Les codes du rock expérimental polyrythmique (ou math rock pour ceux qui aiment étiqueter tout et n’importe quoi) sont pourtant parfaitement respectés, et surtout apportent un son neuf proche du psychédélisme et du mantra. Cependant, le groupe nous propose un son parfois très froid et particulièrement rugueux au service d’ambiances sombres et incantatoires. Autrement dit, le groupe fait très fort en matière de rénovation d’un style un peu hipstos actuellement, et c’est ce qu’on aime entendre.

L’album s’écoute tel un mélange entre un album de techno pure et dure (dans le sens linéaire et rythmé du terme) et un album classique d’Africantape (avec pour exemple les excellents Papier Tigre et Marvin). Pour le dire autrement ; un album à écouter d’une traite sans trop réfléchir afin de l’apprécier à sa juste valeur ; l’écouter avec une oreille assurément attentive et au casque peut paraître plus longuet… quoi que le groupe se démerde carrément bien en matière de rebondissement et il ne faudrait pas appréhender ce disque comme si on allait entendre un disque de ritournelles. L’ambiance est primordiale.

Ceci dit, Electric Electric a la gloire d’offrir un album à l’écoute facile et ludique, et pourtant dont le style est à la base (à mon goût) principalement appréciable à sa juste valeur en live, comme le free jazz en fait.

Cet album pour ainsi dire est un concentré de notre époque : on n’adhère pas à un style précis, mais on sélectionne dans nos goûts sans trop y réfléchir afin de faire notre son, et là Electric Electric ne se vautre pas.

« Discipline » va loin dans le mélange des genres en traversant la musique polyrythmique que j’assimile beaucoup à la musique africaine, au psychédélisme un brin 90’s et shoegazant, le tout copulant allègrement avec le noise et tout ce que la France produit de génial en matière de musique expérimentale.

Car oui, si les Anglais se foutent de notre gueule en matière de rock et de pop, ceux-ci nous respectent en terme de défricheur de son, de par un passé et présent qui laisse ses traces (allez donc par exemple écouter le groupe angevin « Les Thugs » qui sort un génial live actuellement !).

En bref, il faut foncer sur cet album qui a le mérite de nous ouvrir à la fois de nouveaux territoires exotiques et le cœur de nos centrales nucléaires. Vous ne ressortirez pas indemnes de l’écoute de ce disque qui je pense va squatter ma platine pendant quelques mois au bas mot.

Electric Electric nous offre sa vision des valeurs musicales et fait clairement honneur au rock français sous tous ses états.

Vivement la suite!

electricelectric.fr
africantape.com
hrzfld.com
kythibong.org
muraillesmusic.com

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Maxime Dobosz

chroniqueur attaché aux expériences sensorielles inédites procurées par la musique