Une journée au We Love Green festival

Quand on a un événement à Paris centré sur la musique et l’écologie, avec en plus en tête d’affiche Charlotte Gainsbourg, Norah Jones et Camille, on peut pour le moins être inquiet de mettre les pieds dans Bobo-Land. La journée de samedi du We Love Green offre pourtant l’affiche la plus excitante du weekend, c’est La Femme, Micachu, Camille, Beirut, et Klaxons qui nous sont proposés.

Une programmation assez éclectique qui rassemble des artistes qui ont pour point commun d’être tous dans le giron de l’intelligentsia parisienne, celle qui se looke en festival comme si elle allait en boîte, et qui ne jure que par les Inrocks et/ou Télérama (selon l’âge). Pourtant l’ambiance est des plus cools, le prosélytisme pro-environnement est présent, mais pas envahissant (en même temps c’est de bonne guerre, mais soyons honnête 99% des gens viennent surtout pour la musique). Quelques stands d’information, des WC qui sont des toilettes sèches…

Point noir : la nourriture ! Ceux qui pensent qu’il n’y a rien de tel pour tenir au corps en festival qu’un bon gros burger en seront pour leur frais. Ici que du bio, en portion rikiki. Une part de tarte aux figues et un carrot cake pour commencer. Toutes petites, pour 4 euros, mais succulentes. La vraie bonne surprise du festoche est le lieu ; le parc de Bagatelle, qui est tout simplement magnifique. Avec en guest, un soleil pas avare en rayons, on a là un festival à taille humaine, qui n’aura jamais des allures de Koh-Lanta et ne sera jamais suffoquant au long de la journée, comme peut l’être Rock en Seine par exemple.

La Femme / crédit : lexpress.fr

La Femme entame directement les hostilités devant un parterre de gens clairsemé, les portes n’ayant ouvert qu’une heure auparavant. Il est peu dire que ce concert était attendu. Après un sacré buzz qui n’en finit pas depuis plus d’un an, on était impatient de voir ce que ça pouvait donner sur scène. Mission accomplie pour cet intrigant combo. Une demi-douzaine de claviers, pour une batterie et quelques filets de guitare/basse/sitar de-ci de-là, leur formule surf-electro décalée fait merveille sous un des derniers soleils estivaux de l’année. Clairement LE projet à surveiller en 2013, comme le prouve l’imparable « Sur La Planche ».

Le futur groupe favori des hippies chics donne parfois une impression de facilité, mais c’est surtout dût à leur talent insolent.

Micachu & The Shapes / crédit : lexpress.fr

On se remet tranquillement de ses émotions devant Micachu & The Shapes. Un peu mal fichu et trop bruitiste par cette chaleur, et on en profite pour aller déguster une part de tarte aux courgettes (bio bien sûr) et sa salade de quinoa, avec la sale impression que notre estomac nous fera payer ce sevrage un peu plus tard. À noter que si tout est bio dans le festival, ce n’est bien évidemment pas le cas des bières, ça serait dommage quand même de cracher sur cette belle manne financière.

Camille

Puis arrive Camille. On aime ou on déteste, mais impossible de rester indifférent. Si les morceaux sur album peuvent être exaspérants, force est de constater que c’est un univers vaste et coloré qui est proposé, différent à chaque chanson. Parfois énervante, parfois surprenante et émouvante, l’exercice live semble être une cour de récré pour elle. Ça chante en canon, ça cabotine, dans des ambiances de french cancan, de cabaret, et de joyeux bordel organisé. Et malgré un début un peu poussif, voire irritant, quand elle se lance dans ses a capella maniérés, le tout finit par se mettre en place, et je commence à retirer toutes les méchantes choses que j’ai dites sur elle depuis le début. Et puis quelqu’un qui termine son set sur une reprise de Michael Jackson (« Wanna Be Starting Something ») ne peut pas être foncièrement mauvais…

Beirut

La déception de la soirée sera Beirut. Les bobos et les hipsters du festival sont tous aux anges, le public semble conquis, et la nuit est à présent tombée. Vous imaginez, il y a tout ce qu’il faut dans Beirut : le côté folk, l’aspect indépendant, et pour couronner le tout, une caution ethnique ! De l’or en barre ! Tout est ainsi réalisé avec qualité, et application, mais sans grain de folie, et dieu que c’est long ! Difficile de différencier parfois les morceaux les uns des autres, les trois morceaux au ukulélé sonnent comme des copier-coller, et les orchestrations proposent finalement les mêmes textures slaves répétitives. Les fans sont conquis, les amateurs occasionnels auront regretté le manque de punch et de diversité. Le côté solaire de cette musique aurait peut-être gagné à se retrouver programmé dans l’après-midi, à l’inverse d’une Camille qui semblait davantage taillée pour la nuit.

Klaxons / crédit : lexpress.fr

Étonnamment, ce n’est pas la tête d’affiche qui clôt le concert, mais les sympathiques Klaxons. La vie est parfois bien faite, tant les jeunes Anglais méritent ce genre de spot. Si elle était encore mieux faite, ils siègeraient en compagnie des Arctic Monkeys ou Bloc Party au Panthéon des plus belles choses qui soient arrivées au rock anglais ces dernières années. Malheureusement la moitié des festivaliers a quitté les lieux (le Parisien apporte une grande importance au sacro-saint « dernier métro » et ne risquerait pour rien au monde de le louper ou de se retrouver coincé dans la cohue de sortie).

Qu’importe, Klaxons fera danser le festival grâce aux nombreux tubes de ses deux premiers albums. Leur « nu-rave » fait toujours des miracles et emporte la foule dans un tourbillon de rythmes saccadés et saturés, dignes d’un dancefloor de l’espace. Seule fausse note, les deux nouveaux morceaux joués, qui laissent présager avec une peur bleue une nouvelle direction radio-friendly à tendance discoïde un peu grasse.

Impression javellisée dans l’instant dès les premières notes de grandes chansons fédératrices comme « Golden Skanks » ou « Echoes ». Le pari de cette programmation variée aura été réussi, c’est le moins qu’on puisse dire. On repart heureux, la tête pleine de « ouhouhouh » made in Klaxons, et le sac plein de prospectus. Qu’il faudra mettre dans la poubelle jaune bien sûr.

welovegreen.fr

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Sébastien Weber

chroniqueur attaché aux lives comme aux disques d'exception