La Route du Rock 2012 : Rockin’ on Heaven’s Door

Day 1 : Tous les chemins mènent au Rock.

Vendredi 10 août, 18h, la Route du Rock nous ouvre ses portes sous le cagnard breton. Le Fort Saint-Père est assiégé par des festivaliers enjoués et heureux de participer à cette 22e édition. Tenue légère exigée, le premier invité de marque investissant la scène n’étant autre que le Soleil en personne.

18h30 : Yeti Lane s’attaque à l’Everest en se voyant confier la délicate tâche d’ouvrir cette édition 2012. Cette année, les organisateurs ont eu le nez creux en programmant le duo parisien sur la petite Scène de la Tour. Bonne initiative : le combo a pu trouver ses marques facilement sur une scène à sa mesure alors que le public encore clairsemé arrivait progressivement. Leur électro-pop éthérée permit à tout le monde, l’esprit léger, de s’imprégner de l’ambiance malouine que dégage le Fort.

19h15 : le moment que j’attends le plus. Les Anglais d’Alt-J entrent sur scène, l’air décontracté, en tenue de plagistes… Joe Newman (guitare/voix) avec son short à fleurs et Gwil Sainsbury (guitare/basse) avec une casquette à l’effigie de notre chère capitale : Paris. Le public inhabituellement en si grand nombre à cette heure encore précoce du festival montre que le groupe est attendu au tournant, surfant sur la vague du succès de leur premier album ‘An Awsome Wave’. Sans fioriture, le combo nous livre un set à la hauteur de nos attentes. Les festivaliers s’inventent des chorés au cœur desquelles les triangles font figure dominante.

Aucun titre de l’album n’est épargné, les Anglais s’imposent avec brio, rendant une copie presque parfaite, si ce n’est une prestation scénique parfois encore un peu timide. Joe Newman, chanteur à la voix atypique et nasillarde, comble le public de sourires trahissant la joie du groupe d’être sur scène. Pour ma part, je fus comblée par le choix du rappel intitulé ‘Taro’, titre aux élans celtiques et tribaux qui à mon sens reflète l’opus dans toute sa splendeur.

20h25 : Il faut vite se remettre de la claque anglaise, car le surdoué Patrick Watson n’est plus très loin et nous promet une douce bourrasque montréalaise. Avec ‘Lighthouse’, titre mélodiquement magique issu du dernier opus du groupe ‘Adventures In Your Own Backyard’, l’univers folk des Canadiens est introduit de la plus belle des façons.

Fin du premier morceau : « coucou, je suis passée de l’autre côté ». Basculée dans un monde à la sensibilité exaltante, tous les titres de Patrick Watson me parlent. Une voix angélique, des mimiques bien à lui, et une déferlante de bonne humeur, voilà ce qui compose le personnage. Pour ne rien gâcher, il a su s’entourer pour cette scène de musiciens talentueux, délivrant une prestation toute en finesse à la hauteur des arrangements du compositeur génial qu’il est. Seul petit bémol, les festivaliers et moi-même resterons sur notre faim suite à un rappel qui jamais ne nous sera accordé. Hé oui! Même à ce niveau de performance, on est en droit d’être encore un peu plus exigeant.

21h50 : Mea culpA Dominique A ! Je n’ai pas pu assister à ta prestation, j’étais en conférence de presse avec Alt-J.  J’y apprends pêle-mêle que le combo de Leeds s’inspire de la cinématographie de Werner Herzog, que ‘Léon’ de Luc Besson est leur film culte, et que leur premier album est un patchwork aussi bien influencé par le rock d’Oasis que par les groupes africains pop des années 60…

Pendant ce temps, de l’avis des festivaliers, Dominique, tu as encore enflammé le Fort Saint-Père !

00h25 : Civil Civic, inconnu au bataillon pour ma part. Le mouvement de foule se rabattant avec hâte vers la petite scène me laisse penser néanmoins que le groupe a de nombreux adeptes dans le public.

Hélas ! Leur rock instrumental ne me touche pas et les titres s’enchainent de façon brouillonne. Le pogo et le verre de bière renversé sur ma tête auront raison de moi, je cours direct me placer devant la grande scène pour The Soft Moon.

01h05: la nuit noire recouvre les silhouettes des festivaliers dont les esprits s’enhardissent et s’accommode parfaitement à l’univers post-punk du trio débarqué de San Francisco spécialement pour l’occasion. Une nouvelle fois, La Route du Rock frappe fort et nous envoie au tapis en consentant de faire l’effort (financier) de faire venir des groupes en dehors de leur tournée, au nom de la qualité. Dans cette lignée, The Soft Moon a traversé l’Atlantique en exclusivité pour les Malouins, et le moins que l’on puisse dire c’est que la qualité du set en valait le détour.

Millimétrée, puissante, racée, la cold wave des Américains nous plonge dans une noirceur envoûtante qui hantera ma première nuit en terres bretonnes.

Day 2 : London Calling.

19h15 : Lorsque j’arrive dans l’enceinte du Fort, le quatuor londonien Veronica Falls s’apprête à jouer sur la grande scène. Look rétro de rigueur, Ray-Ban Wayfarer sur le nez battent la mesure d’une pop rock exaltante résolument 80’s. La soirée débute sur les chapeaux de roues.

20h20Savages, mon gros coup de cœur. Quatre nanas décomplexées qui foulent pour la première fois une scène française. On est frappé d’emblée par le charisme de Jehnny Beth (pseudo définitivement adopté par la Française Camille Berthomier) au chant. Au sein de cette formation londonienne, Jehn est amputée de John  mais s’entoure de trois amazones aux yeux sombres.

Oscillant entre post punk et rock garage bien crade, le girls band n’économise pas son énergie et me scotche sur place avec ses riffs de guitare lourds et noisy. Après à peine un an de formation et plusieurs concerts anglais encensés par la presse spécialisée, Savages parvient sans peine à électriser la foule qui en redemande encore.

21h25 : Le concert qui suit contraste parfaitement avec la musique des Anglaises et se veut beaucoup plus planant. J’applaudis la carte de l’éclectisme tandis que Lower Dens investit la scène. Le mariage des voix de Jana Hunter (clavier) et de Geoff Graham (basse) nous hypnotise et sont le principal atout du groupe indie folk originaire de Baltimore.

Le groupe enchaîne les morceaux tourmentés et légèrement psychés via une instrumentation épurée, ce qui ouvre parfaitement la voie à la tête d’affiche de la soirée.

23h00: Les festivaliers piaffent d’impatience d’accueillir ceux pour qui ils se sont déplacés en nombre et forment désormais une masse compacte. « Il reste X minutes avant le début du show », s’exclame un type derrière moi. L’ambiance est à la bonne humeur et les applauses sont nourries !

Un X géant en plexiglas trône au milieu de la scène, on est loin du décor un peu plus sommaire d’il y a 3 ans au Festival Beauregard (Hérouville-Saint-Clair). On espère que leur prestation en sera davantage inspirée. Lorsque les Londoniens entrent en scène, l’euphorie est à son paroxysme. Et quelle entrée en matière avec leur nouveau single ‘Angels‘ qui est déjà sur toutes les lèvres.

Je suis heureuse d’être là, même compressée par la foule, je suis heureuse de constater la progression fulgurante du trio ! Une mise en scène impressionnante, une complicité évidente, on fait face à une formation qui a nettement gagné en maturité.

The XX obtient l’ovation des festivaliers à la fin de chaque titre et nous réserve la primeur de cinq nouveaux morceaux figurant sur leur prochain album ‘Coexist‘. Une prestation sans anicroche qui aura comblé toutes les attentes que génèrent les Anglais.

C’est malheureusement ici que s’achève pour moi cette édition 2012, pas de Breton, pas d’Hanni El Khatib… Mais ce n’est que partie remise.

Quoi qu’il en soit, je tiens à souligner l’organisation sans faille et la qualité de la programmation de la Route du Rock qui reste selon moi une référence en matière de musique indé.

Vivement la collection d’hiver 2013 !

laroutedurock.com

Crédits photos : Lucile-Emmá Ljósmyndun